Living in Emergency
Mardi 13/12/2011 | Posté par Pascaline
Mardi dernier, sur le campus de la Timone, Médecins Sans Frontières organisait la projection d’un documentaire relatant le quotidien des docteurs en mission humanitaire. Un débat animé a suivi. Pascaline était présente.
"Living in Emergency Tour". Le titre est aguicheur et pourrait se prêter au dernier épisode d’"Urgences" si la série existait toujours. Il s’agit en fait de la diffusion, par Médecins Sans Frontières, d’un film documentaire dans tous les campus de médecine de France. Cette ONG qui agit en toute indépendance car elle "existe grâce aux dons", nous a-t-on rappelé avant la projection, fête ses 40 ans d’existence. C’est donc dans ce cadre qu’avait lieu la projection, le 6 décembre, sur le campus de la Timone.
La guerre en toile de fond
"Living in Emergency" est un documentaire, réalisé en 2006 par Mark Hopkins, un réalisateur indépendant américain, avec l’autorisation de Médecins Sans Frontières. Il ne s’agit donc pas d’un long-métrage de promotion, avec l’objectif de recruter des médecins pour MSF sur les campus de France.
Si nous en avions douté, les débats en interne qu’il a suscités nous ont prouvé le contraire. Le film a été tourné au Liberia, pays ravagé par la guerre civile qui n’a plus de système de santé au moment du tournage, et en République Démocratique du Congo, où un conflit chronique s’est installé à l’est du pays, depuis la fin du génocide rwandais, en 1994.
Héros, mais pas trop
Le film a un côté héroïque, qui met en scène des personnalités parfois à la limite de la mégalomanie et évite de justesse l’image des "super docteurs" qui s’en vont en mission pour sauver le monde. Pourtant, il dévoile aussi les défaillances des médecins, dans les conditions extrêmes où ils exercent, leurs larmes, leurs colères, leurs folies,…
Et il questionne la vie de ces personnages (qui arrivent à manger des cornes flakes au petit déjeuner dans un pays en guerre). Une réflexion sur la place de ces expat’ dans les pays où ils interviennent : place qu’on leur donne et place qu’ils prennent.
A plusieurs reprises dans le film, on leur fait remarquer, et ils en ont conscience, que leur place est toujours temporaire dans leur société d’accueil. Eux peuvent partir à tout moment, tandis que les gens qu’ils soignent sont chez eux et ne peuvent pas partir.
Ce film est une plongée à vif dans la réalité de l’aide humanitaire d’urgence qu’il démystifie avec des images qui nous font parfois détourner les yeux, mais aussi à travers les angoisses des acteurs de terrain, leurs regrets et leurs dilemmes : choix d’un patient à l’entrée de l’hôpital (triage), choix des soins à administrer dans des conditions extrêmes, choix de partir ou de rester,…
Ces décisions sont difficiles, mais ils doivent les assumer. Ainsi, ils apprennent à leurs dépens que l’erreur est humaine…
Questions d’engagement
A la fin de la projection, un débat avec la salle s’est organisé, principalement des étudiants en médecine étaient présents. En face d’eux, des professionnels de Médecins Sans Frontières (médecins ou non) apportaient leurs témoignages.
Quelles sont les conditions pour partir ? Combien de temps ? Avez-vous parfois eu peur ? Voici quelques unes des questions qui ont été posées. Il y a eu des réactions aussi, comme celle de ce jeune étudiant qui fait remarquer à la salle que ce genre de film leur permet à tous de "sortir la tête du guidon", des examens, de la pression, pour prendre conscience de ce qui se passe dans le monde.
Il a aussi lancé un appel à l’engagement ici, en France, car, dit-il, "il y a aussi des besoins" et des organisations de la société civile qui agissent en ce sens.
Ce film peut être perçu, que l’on soit médecin, humanitaire ou non, comme une réflexion, sans aller jusqu’à dire sur le sens de la vie, tout du moins sur le sens de nos actions ici, et sur la conscience d’un "ailleurs" où les réalités sont différentes.
"Living in Emergency Tour" est organisé du 8 novembre au 30 décembre dans toute la France.
Crédit photo : raffaelebrustia
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