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Marseille, terre (battue) d’espoir

Jeudi 25/04/2013 | Posté par Charlotte Peyramaure (EJCM)

Comment rebondir grâce à une petite balle jaune ? Elyes, jeune espoir du tennis marseillais, raconte son parcours.

La terre battue, les balles, les raquettes, les matches… Pour Elyes, bientôt 2O ans, le tennis est bien plus qu’un sport, c’est une grande passion. Aujourd’hui classé 15/2, il évolue au CSM Cercle Sportif de Marseille – où il s’entraîne presque tous les jours. Rencontre avec un jeune des quartiers Nord, motivé et transporté par cette discipline, trop souvent cataloguée comme « élitiste ». 


A Marseille, comme ailleurs, le quotidien d'un jeune d'origine maghrébine n'est pas toujours simple. Souvent étiquetés "racailles", "voleurs" ou encore "délinquants", les jeunes des banlieues tentent de « tracer leur route » et de se dessiner un avenir, malgré les « on dit » et les préjugés.


Une autre issue que le football
Le ballon rond à Marseille, bien plus qu’une institution, une religion. Pourtant Elyes Chaker, d’origine marocaine, a su trouver une autre voie que celle de Valbuena ou de Ribéry. Né le 28 Juin 1993, il a grandi dans le quartier de Saint-Louis, où il a passé toute son enfance, rythmée alors entre l’école et le football.

« Le foot c’était tout le temps. A la récré on jouait au foot, le soir quand on rentrait on jouait au foot, le week-end aussi ». Un sport pratiqué par tous, populaire, et surtout accessible.

En 2OO7, il fait la rencontre de Guy Pinna, président de l’association sportive de Marseille AS TIME, une structure unique en France, basée sur le social dans le domaine du tennis depuis 1989. « Il demandait aux jeunes : qui veut jouer au tennis ? Je me suis inscrit et ça m’a plu tout de suite. J’étais motivé ! ».

C’est ainsi qu’Elyes se retrouve au Tennis Club Nord, à la découverte d’un sport qu’il ne pensait pas autant apprécier. « Ça m’a plu car au tennis tu es seul. Si tu fais une bêtise c’est de ta faute, tu ne peux t’en vouloir qu’à toi-même alors que dans le foot, si tu fais une erreur, toute l’équipe plonge avec toi ». Un esprit et « une mentalité différente » qui l’ont séduit, au point d’en faire une passion.


La peur de l’avenir
2OO8, premier tournoi, premier match, première victoire « au club de Creissauds, à Aubagne. Je m’en rappellerai toute ma vie. C’était mon premier match officiel. J’ai gagné le premier tour, et j'ai perdu au second, mais c’était génial ! ».

Par la suite, l’association AS TIME organise une rencontre à Nantes, où toutes les associations de France jouent entre elles, durant trois jours. Trois jours pendant lesquels des débutants s’échangent des balles, gagnent des sets, et apprennent à se connaître. Un concept organisé chaque année, qui repose sur la convivialité et la découverte du jeu.

En 2O11, le président du club voit la progression rapide du jeune marocain et l’amène au CSM. Une opportunité qu’Elyes saisit et savoure aujourd’hui. En s’entraînant dur chaque semaine, il met beaucoup d’espoir dans le tennis mais garde les pieds sur terre malgré tout, et sait qu’il faut qu’il ait le bac pour travailler plus tard.

En Terminale ENE (énergétique) au Lycée Diderot, c’est un bon élève. Il aimerait croire en ses études mais l’échec lui fait peur, « j’ai raté le bac l’année dernière, comment est-ce que je pourrai réussir à la fac ? ».

Les jeunes des quartiers ont parfois du mal à croire en l’avenir. La scolarité les bloque souvent, et un échec devient facilement un obstacle. Pourtant le jeune tennisman a envie.

« On est 24 dans la classe, et il n’y a aucune fille, déjà c’est pas facile au niveau de l’ambiance. En plus, quand tu es deux à vouloir travailler, et que tous les autres ne font rien, tu es obligé de suivre le mouvement ».


Le mouvement, une difficulté souvent rencontrée dans les lycées, et plus encore dans les classes d’examens. Peur de l’avenir, oui, mais pas sans espoir.

« J’aimerais aller en STAPS à Luminy, (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives, ndlr) je voudrais passer la Licence, je suis vraiment motivé ».

Cette ferveur, Elyes la cultive tous les jours : « il faut travailler » pourrait être son crédo. « Je suis en stage en ce moment, je suis technicien de maintenance. Quand je ne suis pas dans l’entreprise, je travaille, je révise mon bac ».

Animateur dans un centre de loisirs pour donner un coup de main, arbitre et éducateur à l’école de tennis du CSM, Elyes est un jeune actif, toujours en mouvement : tennis, révisions, animation, un emploi du temps bien chargé pour un jeune de son âge. Mais Elyes garde toujours le sourire et saisit chaque instant.


Délinquant ou tennisman
Ils sont plusieurs comme Elyes, à Marseille, à mettre tous leurs espoirs dans ce sport. Avec 1O1 547 licenciés, le tennis est devenu cette année le sport numéro 1 sur l'ensemble de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Le football, avec 99 948 licenciés, n'est ainsi plus le sport leader en Paca.

Pourtant, ce n’est pas facile tous les jours. « Avec ma couleur de peau, c’est chaud ! ». Typé, Elyes sent les regards posés sur lui et les jugements de certains. « Quand j’ai été Champion de Provence en 2O11, il n’y a que mon club qui a applaudi. Les autres regardaient sans me féliciter, tout ça parce que je suis mat de peau ».

Une étiquette qui peut parfois aller très loin, « une fois, quand j’avais 17 ans, je jouais au SMUC (Stade Marseillais Université Club). Une balle est retombée fausse et lorsque je l’ai signalée, mon adversaire m’a traité de tricheur, et de sale arabe. Personne n’a rien dit ».

Des propos déplacés et injustes, mais que le jeune tennisman a assez entendu et essaie de dépasser aujourd’hui. « Chaque année je reviens, je leur montre que je ne suis pas un tricheur, que je joue au tennis et que je gagne honnêtement ».


« Il n’y a qu’une seule vérité, celle du terrain »
Même si tous ne réussissent pas, il faut reconnaître que les jeunes ont une grosse envie de s’en sortir et sont fiers de leur origine, malgré la mauvaise image qu’en donnent les médias. Et que quelqu’un qui vit dans une cité défendra toujours ses couleurs, quoi qu’il arrive.

Maxime Vian, licencié au CSM, apprécie la persévérance d’Elyes. Pour lui le sport permet d’apprendre certaines valeurs importantes, « les valeurs dans le sport sont les mêmes que dans le milieu professionnel. A travers le sport, on inculque les bases fondamentales de la vie active aux jeunes ».

Des qualités qui permettront au jeune tennisman de progresser dans sa vie de tous les jours, et de faire face aux différents obstacles qu’il pourra rencontrer. Car après tout, le sport, c’est l’ouverture à la culture de l’autre, c’est le rassemblement de gens différents autour d’une même passion.

« Il n’y a qu’une seule vérité, celle du terrain. 
Le tennis est ce qui m’a permis de ne pas faire de bêtises. Aujourd’hui je me concentre là-dessus et y passe la plupart de mon temps ». Champion de Provence en 2O1O, 2O11 et 9ème en 2O12, Elyes a fait bien du chemin depuis sa rencontre avec Guy Pinna.

Chaque été, il enchaîne les tournois de la région, « Nice, Nîmes, Montpellier… comme j’ai la voiture je me déplace facilement, je peux faire jusqu’à 3h de route »

Non classé à ses débuts, il a progressé chaque année pour être aujourd’hui 15/2. Une performance qu’il doit à sa motivation, à son courage de ne jamais rien lâcher. Plus tard, il se voit diplômé de STAPS, avec un BE (Brevet d’Etat) pour être professeur-animateur. « Le BE français est très demandé au Maroc. Je pourrai y travailler l’été, dans les centres de vacances ».

Certes, il n’y a pas que le sport comme voie de réussite pour les jeunes des quartiers. Mais dans les autres domaines, sont-ils jugés à la même enseigne qu’Elyes à niveau d’étude égal ?




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Crédit photo : Charlotte Peyramaure




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Charlotte Peyramaure (EJCM) -


Réactions des internautes

Charlotte Peyramaure
Vendredi 26 Avril 2013, 20:20
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Erratum
Lors du match au SMUC, ce n'est pas l'arbitre qui a eu des propos racites envers Elyes mais le joueur adverse.  


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Marseille Bondy Blog
Mardi 7 Mai 2013, 13:34
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Re: Erratum
 La correction a été faite dans le texte. 

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