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« Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant »

Mardi 12/03/2013 | Posté par Charles-Henri Roux (EJCM)

Le titre de cet article est tiré du poème "L'Affiche Rouge", de Louis Aragon. Il nous rappelle le rôle essentiel des étrangers pendant la Résistance. Notamment celui tenu par Missak Manouchian.

Au moment où l’on soulève les problèmes d’intégration, d’adaptation à la culture française, il est important de s’arrêter sur l’héritage de cette culture. La France s’est construite autour de son histoire, il nous faut la raconter sans omettre aucun détail. C’est notre rôle de citoyen que de ne pas oublier.

Samedi 23 Février la JAF (Jeunesse Arménienne de France) de Marseille, a honoré la mémoire de ces résistants tombés au combat. C’est au square Missak Manouchian, situé sur le boulevard Charles Livon, qu’anciens combattants, élus, et citoyens se sont retrouvés pour rendre hommage à ces hommes morts pour leur terre d’accueil.

A l’heure de la mondialisation, Missak Manouchian apparaît comme précurseur. Ce citoyen du monde, a combattu avec son groupe composé essentiellement d’étrangers : huit Polonais, cinq Italiens, trois Hongrois, deux Arméniens, un Espagnol, une Roumaine et trois Français.

Au nom des idées et de son amour pour la France il a résisté. Au nom des droits de l’homme et de cette patrie qu’il voit comme le symbole de la démocratie, il a donné sa vie. Il n’a jamais été destiné à faire la guerre mais celle-ci de tout temps l’a rattrapé, comme s’il ne pouvait lui échapper.

Il naît en Arménie, et connaît le génocide orchestré par les Turcs durant lequel il perdra son père tué lors d’un massacre. Sa mère mourra plus tard de maladie due à la famine.

Orphelin, il arrive en France à 19 ans en 1925. Homme de lettres, ouvrier, philosophe, il est difficile de définir ce héros de la République. Engagé politiquement au Parti Communiste, il n’oublie pas ses racines et intègre le groupe MOI (Main d’œuvre Immigrée).

Il est à la tête du comité de secours pour l’Arménie et rédacteur de son Journal Zangou. Il prend la direction des FTP (Francs-Tireurs et Partisans) de la MOI parisienne sous les ordres de Joseph Epstein.

Il restera à la tête de ce mouvement résistant jusqu’à sa mort. Il sera fusillé le 19 Février 1944 avec vingt-deux de ses camarades.

Les Allemands et Vichy tentèrent de transformer cette arrestation et le procès qui suivit, en propagande contre la résistance. Ils les nomment l’Armée du Crime et les mettent en scène comme des criminels dans ce qui restera comme « l’Affiche Rouge ».

Le groupe est fustigé, présenté comme des meurtriers sans idéaux. Sur des tracts diffusés par l’armée Nazi on peut lire « Si des Français volent, sabotent et tuent, ce sont toujours des étrangers qui les commandent ; ce sont toujours des chômeurs et des criminels professionnels qui exécutent, ce sont toujours des juifs qui les inspirent ».

Manouchian au moment de mourir, laisse dans une lettre à sa femme Mélinée une réponse pleine d’humanité. Lui qui n’était pas Français mais immigré délivre un message de paix et de fraternité qui dépasse les frontières et en devient universel.

« Je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu’il mérite comme châtiment et comme récompense. Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps ».

Des mots qui font de lui un exemple et un symbole de la liberté. Il nous offre sa vision du monde à laquelle on ne peut qu’adhérer.

Une universalité qui doit être partagée, un devoir de mémoire qu’il faut sans cesse renouveler, pour que jamais nous n’oublions que ceux qui ont résisté n’étaient pas que Français. 


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Crédit photo : Charles-Henri Roux



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