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«La République vous dit bienvenus !»

Vendredi 20/02/2009 | Posté par Sophie Floret (EJCM) et Benoît Gilles

Tous les mois, la Préfecture organise une cérémonie d’accueil des nouveaux Français, fraîchement naturalisés. Des Comores, de Madagascar, de Russie, d’Algérie… Ils étaient 74 à entrer « dans la Nation» sous les ors de la République.

Il y a une foule inhabituelle à l’entrée de la Préfecture de Marseille. Des petits groupes, femmes, hommes, enfants de tous âges et toutes origines, entrent sous le grand porche, un document à la main, qu’ils font viser par le planton. Au pied du grand escalier, nouvel arrêt, on coche les noms sur une liste avant de leur donner les paroles de la Marseillaise. Et oui les 74 nouveaux Français et leurs proches venus ce mercredi 18 février à la Préfecture pour la Cérémonie d’accueil devront entonner l’hymne national comme les 100 000 étrangers naturalisés chaque année.
«Pas trop inquiète à l’idée de chanter ?», demande-t-on à une maman accompagnée de ses enfants. «Non, ils vont m’aider. Ils connaissent, ils vont au stade», dit-elle en désignant ses deux fils. On la prévient quand même que le «Aux Armes» des supporteurs marseillais est assez différent du chant de Rouget de l’Isle. Mais trêve de bavardages, le salon d’honneur de la Préfecture est déjà plein, on attend les derniers invités pour lancer la cérémonie. Les gens regardent les plafonds chargés d’or. Quand on vient pour la première fois, la République, ça en jette.

Tout commence par un petit film de propagande républicaine puis le maître de cérémonie fait son entrée. Vêtu de son uniforme aux feuilles de chêne dorées, le secrétaire général de la Préfecture, Jean-Christophe Reynaud représente la République à lui tout seul. Mon voisin n’est guère impressionné. Agé de 61 ans, il est arrivé en France en 1963. «Franchement, la France, je connais. J’aurais pu faire la démarche depuis longtemps mais les parents étaient contre, surtout ma mère, elle aurait eu de la peine». Tout ça pendant le laïus du Préfet. Tout de même, écoutons un peu…

«La France est fière de vous accueillir. Désormais votre lieu de résidence est aussi votre patrie. Dans quelques instants, je vais vous remettre votre dossier de naturalisation qui contient le décret qui vous octroie la nationalité et la citoyenneté française. En devenant Français, vous allez participer à la vie d’un pays dont la richesse culturelle est infinie. Cette culture est maintenant la vôtre. Vous pouvez en tirer une légitime fierté». Pas un mot pour signaler qu’ils ont également une culture d’origine qui fait aussi la richesse de la France, ce n’est pas l’objet du moment. On parle droits et devoirs, vote, défense du territoire national… Le Maître de Cérémonie insiste sur l’égalité homme/femme, la laïcité et la pratique de la langue…

Qu’un sang impur…
Puis vient la Marseillaise. La musique démarre après Jean-Christophe Reynaud, plein d’allant et surtout équipé d’un micro. Les autres chantonnent avec entrain ou en traînant les pieds. On en arrive aux féroces soldats qui égorgent nos fils et nos compagnes, on peut passer à la remise des dossiers. Chaque naturalisé est appelé. Là encore, les réactions sont contrastées. Certains sont venus en costume et en cachent pas leur émotion, d’autres vont retirer leur papier comme on va à la Poste, la poignée de main en plus. On peut passer au goûter républicain.
Voahirana Raholimina est ravie. Elle est venue avec son fils Princy, naturalisé comme elle. «Je suis francophile depuis mon enfance à Madagascar. Au-dessus de mon lit, j’avais la photo d’un bocage normand. Pour moi, c’est vraiment un aboutissement».

Pour Ahmed et Fatima, la motivation n’est pas exactement là-même. Arrivés en France dans les années 80 pour faire leurs études supérieures, ils évoquent des causes mêlées. «Il y a le travail, les enfants et puis aussi l’actualité, le Ministère de l’identité nationale et tout ça, on s’est dit qu’il valait mieux», raconte Ahmed. Sa femme ajoute : «Moi, j’ai pris la décision quand je suis venue à la Préfecture avec mon fils pour le renouvellement de la carte de séjour. On a été maltraité, il y a une bagarre, mon fils a été très choqué. Je me suis dit plus jamais ça ».
D’autres se dépêchent de partir rejoindre leur travail sans prendre le temps de boire un verre. C’est le cas de Mohamed, d’origine marocaine. Il s’est absenté pendant 2 heures pour participer à la cérémonie. «Je suis en France depuis 1977. Mes grands parents étaient là dans les années 40-45. Tous mes frères sont enterrés ici. Je suis mieux intégré en France qu’au Maroc. Ça a pris deux ans pour avoir la naturalisation. C’est vrai qu’il faut savoir parler français, c’est normal. Mais, franchement, je suis fier d’être Français».
Pour Magdalena, 33 ans, d’origine polonaise, la cérémonie a été plus émouvante «Quand je suis venue en France, il y a neuf ans, je ne pensais pas devenir Française un jour. Et même si, avec l’Union Européenne, la nationalité n’est plus aussi importante, je suis contente d’être comme mes filles»
Parfois la naturalisation est un moyen de changer de vie, ou de prénom ou l’inverse. En tout cas, Russe d’origine tchétchène, Shakhbolat demande à ce qu’on l’appelle Jean désormais. Réfugié politique depuis 1998, il a choisi la France comme terre d’accueil. «Avec tout ce qui s’est passé dans mon pays, j’ai fait le choix de venir en France. Je suis fier de ce pays. Je me sens en France comme n’importe quel Français. Et ce soir, avec ma femme, ma fille et mon ami Gadji qui m’accompagne, on va faire la fête !».

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