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Armée, porte de salut ?

Vendredi 06/03/2009 | Posté par Rima Lmouaci (EJCM)

En échec scolaire ou sans perspective professionnelle, certains jeunes préfèrent tenter une carrière militaire plutôt que de continuer à tenir le mur. C’est le cas de Meheidine, 19 ans, originaire des quartiers nord.

On les appelle les ''hitistes'', littéralement les ''teneurs de murs'', non-profession nationalement reconnue dans les quartiers. Évolution de carrière ? Le ''hitiste'' n'a souvent pas de perspectives d'avenir professionnel. Il revient toujours passer son temps libre à squatter le mur nourricier qui l'a vu grandir avec les potes. Partie à la rencontre de jeunes qui galèrent, de petits boulots en petits boulots, d'échecs scolaires en échecs professionnels, je croise Meheidine, un jeune de 19 ans qui a enfin trouvé sa voie et veut couper le cordon ombilical en quittant les murs des quartiers nord. «J'ai trouvé ce qu'il me faut : l'armée».  Motivation réfléchie, ou illusions d'un jeune en quête d’un avenir? Il nous raconte.

Marseille Bondy Blog : Comment as-tu eu l’idée de t’engager dans l’armée ?
Meheidine : « C’est marrant que tu me demandes ça parce que le mec du recrutement m’a posé exactement la même question hier. J’ai raté mon BEP comptabilité et mon échec scolaire m’a motivé à faire les démarches pour entrer dans l’armée. J'ai l'idée dans la tête depuis ma journée d’appel l’année dernière.

MBB : Comment se passe le recrutement?
M : J'ai passé un premier entretien, ils voulaient savoir un peu ma motivation. Le recruteur  m'a posé pleins de questions comme : « C’est quoi un soldat ? » « C’est quoi la journée type d’un soldat ? », ou encore « Que fait un soldat le matin au réveil ? ». En fait je ne m’attendais pas trop à ça, j’aurais préféré que l’on m’explique tous ça avant le recrutement.
Je passe un deuxième entretien de motivation la semaine prochaine. En attendant je dois me renseigner moi-même sur l’armée, les métiers etc. On m’a donné un site internet à aller consulter, toutes les réponses aux questions doivent y être.
Après l’entretien, il y a deux jours de tests à passer à Lyon, mon recruteur m’a demandé si j’étais prêt physiquement, je ne sais pas vraiment ce qui m’attend mais je sais que ça va être très physique. Mais je suis prêt, je suis motivé.
A mon retour de Lyon, le recruteur va recevoir mes notes obtenues aux tests, et alors si tout va bien nous signerons un contrat.


MBB : Est ce qu'on t'a demandé de décrire ton parcours professionnel, et ce que tu attends de l'armée ?
M : En fait mon oncle m’a aidé à faire ma lettre de motivation et mon CV et j'ai tout expliqué dans ma lettre. Même si le recruteur ne me l'a pas demandé, j’ai parlé de la galère du quartier. Il est vraiment gentil, il m’a dit qu’il avait l’habitude de s’occuper des jeunes, que lui aussi a grandi dans les quartiers, il savait ce que c’était.
Pour un métier, on en a parlé un peu, mais d’abord on s’engage comme soldat, il faut passer par là, après j’aimerais vraiment me former à un métier.

MBB : As-tu  un métier précis en tête?
M : J’ai postulé à l’armée de terre, parce que je voudrais être brancardier-secouriste. En fait j’ai eu l’idée de ce métier grâce à une femme de la mission locale qui s’est occupée de moi quand j’ai arrêté l’école. Elle m’a aidé à trouver ce qui me plaît dans la vie.

MBB : Les recruteurs viennent-ils dans les quartiers?
: Je n’ai jamais vu personne venir nous parler de l’armée dans le quartier, mais des fois il y a des affiches et c’est surtout quand tu connais quelqu’un qui passe par là que ça te donne des idées. J’ai un collègue qui a 19 ans aussi et avec son CAP mécanique il a été pris dans l’armée, pour s’occuper des chars je crois. Il est à Carpentras pour 6 mois, il nous donne des nouvelles par messages de temps en temps. Déjà parti depuis un mois ça lui plaît, mais c’est la galère : entre mardi et jeudi il n’a dormi que 3h !

MBB : Ça ne te fait pas peur ?
M : Non! Je suis prêt physiquement, même si on me dit de partir un an à l’étranger je reste motivé. Mon but c’est de m’engager et de faire un métier qui me plaise. Inch’Allah ».

Propos recueillis par Rima LMouaci.
Illustration: photographie d'une image de Jean Teulé in "Bloody Mary", éditions Glénat

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Rima Lmouaci (EJCM) -


Réactions des internautes

Romuald
Vendredi 6 Mars 2009, 19:05
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Lorsque la professionnalisation des armées a été entamée dès 1997, l'armée a connu un sérieux déficit capacitaire en terme d'effectifs.
Aussi furent menées des campagnes de pub à la TV, furent abaissés les critères physiques, psychologiques et médicaux et furent incités les jeunes par un appât financier.
Notamment les jeunes issus de quartiers défavorisés.

Furent même institués des quotas, toujours en vigueur, correspondant à environ 20% de jeunes issus de milieux défavorisés. Pour être clair, il s'agissait surtout - et il s'agit toujours - de jeunes issus de l'immigration afro-maghrébine. Plus maghrébine du reste, qu'afro-antillaise.
Concernant les DOM mais aussi Mayotte, la Nvelle Calédonie et la Polynésie, il existe des régiments/groupements SMA (service militaire adapté) permettant de former des jeunes filles et gars à divers métiers.



L'armée américaine notamment l'US Army (équivalent de notre armée de terre) a adopté cette stratégie de recrutement vers le bas vers 2004, alors que s'ammoncellaient les bodybags càd les sacs noirs dans lesquels étaient rapatriés les corps des soldats morts au front - Irak en l'occurence.
Sauf que les officiers recruteurs US ratissèrent les bas-fonds de la société US pour atteindre leurs effectifs, et ce ne sont plus les seuls chômeurs qui ont été ciblés..


Pour en revenir à nos Français, nombre de jeunes y sont entrés pensant y trouver sécurité de l'emploi, gîte, couvert et solde. Ce sont ceux qu'on appelle des gamellards, dans le jargon.
Mais la dure réalité à laquelle ils sont confrontés une fois en unité en dissuade certains, au cours des 1ers mois que dure leur formation initiale. ceux-là ne font pas long feu et partent d'eux-mêmes, ou sont fotement incités à le faire.

En gros, tous ceux ayant des soucis - le mot est faible - manifeste avec l'autorité, la discipline, le respect et finalement les valeurs défendues par l'armée (honneur, courage, engagement personnel, abnégation, cohésion, respect, discipline, esprit d'initiative, obéissance, sens de discernement, du devoir, tempérance, intégrité; plus le respect du drapeau, de la patrie et de la nation; liste non exhaustive..) n'ont pas leur place dans l'armée.
Et ce sont aux jeunes de s'adapter, non à l'armée à s'adapter à eux.


Aujourd'hui, le rythme des opex (déploiements au Kosovo, au Liban, au Tchad, en Côte d'ivoire et en Afghanistan) sont réguliers, à raison d'une opex tous les 14 mois voire 12 mois environ; sans compter les cycles de préparation opérationnelle, de mise en condition ops.
Bref beaucoup d'exigence, de risques; peu de temps à soi.

Ajouté à cela le fait que l'armée est devenue une entreprise, et les contrats ressemblent de plus en plus à des CDD et non des CDI; à moins de passer les exams qui vont bien afin de faire carrière et de pouvoir prendre sa retraite après 15 ans minimum.


Bref seuls celles et ceux ayant la gnaque, la grinta, la pugnacité parviendront à atteindre les 15 ans.
Pour ma part, à cause notamment des gamellards, ayant eu marre de jouer l'assistant social, l'éduc spé, le policier, et même le douanier (ce que je suis pourtant aujourd'hui), je me suis tiré sans attendre les 15 ans..
Problèmes de disciplines, d'insubordination, de drogues..
Et en discutant avec d'autres ancien mili, pas forçément de l'armée de terre, on s'est rendu compte qu'il s'agissait d'une appréciation généralisée.
Mais la Grande muette restera.. muette.


Pour finir, se pose de plus en plus le problème des religions, notamment de l'islam.
Dernièrement, une jeune de confession musulmane s'est fait virer pour avoir refusé d'aller en Afghanistan, refusant d'avoir à combattre d'autres musulmans.
Lorsque l'armée a été déployée dans les Balkans au début des années '90, les éléments musulmans étaient déjà briefés (la Bosnie étant majoritairement musulmane) mais il n'y a pas eu trop de souci d'autant plus que les musulmans des Balkans (Bosnie puis Kosovo) ont plutôt été protégés par nos forces armées (avec réticence puisque Mitterrand ne voulait pas s'opposer à ses amis serbes au tout début des années '90)..

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Tom
Samedi 7 Mars 2009, 15:44
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Romuald fait son coming out
Eh bah voilà, Romuald nous a fait son coming out. Il est militaire. J'avais un peu de mal à le cerner mais je comprends mieux ses commentaires (notamment quand il parle des jeunes). Enfin j'ai rien contre les militaires même si les valeurs de l'armée, la patrie, la nation ne sont pas les miennes.

Une armée black, blanc, beurre... Plutôt abolir l'armée (là j'attends ta réponse Romuald). Certains pays ont franchi ce cap. J'espère que tu ne le prendras pas mal Romuald (et que tu comprendras qu'il n'y a dans mon propos que l'envie de taquiner gentiment). Je trouve intéressant de pouvoir tous confronter nos opinions. Et je respecte les tiennes même quand je ne les partage pas. Salut à toi.

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Romuald
Dimanche 8 Mars 2009, 01:29
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Il semble que tu ne saches pas bien lire, à moins que mon (trop) long post t'ait donné des vertiges.
 

Pour ma part, à cause notamment des gamellards, ayant eu marre de jouer l'assistant social, l'éduc spé, le policier, et même le douanier (ce que je suis pourtant aujourd'hui), je me suis tiré sans attendre les 15 ans..

Aucun "coming-out" de ma part. Il faudrait pour commencer que ce soit une tare d'avoir été au service de la nation; d'autre part, si tu lisais le BondyBlog, tu aurais déjà été au courant de mon job.



Quant à supprimer l'armée, ma foi, tu es parfaitement libre d'avoir des opinions sur la question et de les exprimer, puisque tu es citoyen et peut-être même contribuable.
Entretenir des forces armées et en prime une force de dissuasion nucléaire peut sembler complètement obsolète et superflu, dans un monde où le risque des guerres inter-étatiques s'est écroulé avec la chute du Bloc soviétique.
A moins de vivre en parfaite autarcie, de nous replier sur nous-mêmes et de nous retirer de toute instance internationale, je ne vois pas comment nous pourrions nous passer d'une armée, pour défendre nos intérêts d'une part, et certaines de nos valeurs. A moins, là encore, de renoncer à dispenser notre morale civilisatrice au reste du monde; mais là, faudra pas venir se plaindre qu'on ne bouge pas le petit doigt quand d'autres se massacrent allègrement.


Il faut une certaine cohérence: on ne peut pas se prétendre humaniste, réclamer des interventions en RDC, au Darfour, ou intervenir entre Israël et le Hamas tout en se revendiquant pacifiste.
Etre pacifiste, c'est fermer les yeux face à la dure réalité du monde, c'est se renfermer dans son petit confort en se disant "pourvu que ça n'arrive pas jusqu'ici".
Le relatif confort dans lequel nous vivons aujourd'hui, même s'il y a beaucoup à redire, ce n'est sûrement pas aux pacifistes qu'on le doit. Au contraire, c'est à cause de la passivité des pacifistes face à la belliquosité des nationalistes que 39-40 est arrivé.
Toujours à cause des pacifistes qu'on (l'Europe) a laissé des peuples se génocider dans les Balkans, au Rwanda; à cause de la passivité que la RDC a à déplorer 5 millions de morts depuis plusieurs années, ou que le conflit au Sri Lanka a déjà provoqué 70.000 morts.


Sinon, j'ignorais que des nations avaient supprimé toute force armée sur leur sol, je suis curieux d'en connaître la liste.
S'il s'agit d'Andorre, la République de St Martin ou encore Liechtenstein ou je ne sais quoi, il s'agit de micro-états.

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