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Refaites le mur !

Vendredi 21/01/2011 | Posté par Julie Desbiolles

A MARSEILLE, ON AIME LES GRAFFITIS, alors quand le 15 décembre dernier, un film sort sur l'un des plus grands pochoiriste du monde, ça ne nous laisse pas indifférent. Julie a décrypté pour nous le mystère Banksy.

Le 15 Décembre dernier, le film Faites le mur sortait dans les salles. 17ème au box office la semaine de sa sortie, ce relatif succès tient probablement à son énigmatique réalisateur, le fameux street artist Banksy. Anonyme et militant, le pochoiriste cultive depuis plus de 20 ans le mystère sur son identité Son film-documentaire, dont je ne louerai ni la construction, ni le scénario, ni même le tournage qui a tendance à donner le mal de mer, fascine parce qu’il parle de Banksy.

Banksy est un personnage médiatique entièrement construit à travers les pochoirs qu’il sème sur les murs. Rares sont ceux qui ont pu voir son visage. Les quelques concernés, graffeurs et autres street artistes, prononcent son nom avec distance : quand on en vient à Banksy, plus personne ne sait rien. Banksy, c’est l’homme qui poche un rat géant sur les murs de New York, renverse une cabine et l’assassine à la hache sur les trottoirs de Londres, ouvre une fenêtre sur le mur séparant Israël et Palestine, et qui accroche ses propres toiles au Tate Museum. Peu connu en France mais véritable star en Angleterre et aux États-Unis, le personnage reste énigmatique : après 20 ans de travail, quelques expositions et de rares interviews, il a toujours réussi à échapper et aux autorités et aux médias.

C’est ce personnage que Thierry Guetta, petit homme rondouillard et caméra vissée poing, un brin loufoque mais loin d’être une lumière, s’est mis en tête de traquer. Après avoir suivi les quelques étoiles du milieu - Space Invader et ses mosaïques issues du jeu du même nom, Sheipard Fairey et sa campagne « Obey ! » - il décide de compléter sa collection en traquant l’étoile manquante : Banksy. Il parvient contre toute attente, et réussi à capturer quelques images (de dos et dans l’ombre) de Banksy durant ses nuits de grande activité.

La naissance de Mr Brainwash
Faites le mur ! parle donc d’abord de graff, d’une plongée dans la nuit urbaine. Mais tout bascule lorsque Thierry Guetta, sur les conseils involontaires de Banksy, se met en tête de devenir lui-même Street Artist. C’est ainsi qu’il se transforme en Mr Brainwash. Dès lors, le film se détache de son sujet central - le graff - pour décrire l’ascension d’un homme sans talent ni intégrité, qui sous-traite la fabrication de ses œuvres et pille les idées, mais qui a une maitrise si ce n’est parfaite au moins admirable du système médiatique. En quelques mois, Thierry Guetta, père de famille ordinaire, devient Mr Brainwash, street artist imbécile et sans talent dont les œuvres s’arrachent à des prix d’or. Après une première exposition en 2008, Mr Brainwash produira même, en 2009, la couverture de Celebration de Madonna.

La morale de l’histoire ? Il n’y en a pas, dit Banksy. Actuellement lui aussi très en vogue sur le marché de l’art - certaines de ses œuvres, découpées dans des murs et mises aux enchères, se négocient jusqu’à 200 000 dollars - il montre par ce personnage l’absurdité des règles qui régissent le monde de l’art et la célébrité, et montre aussi la facilité de manipulation des médias.

To be Banksy or not to be…
Des questions restent cependant en suspens. Mr Brainwash existe bel et bien : plusieurs reportages sur lui ont été diffusés, et notamment aux USA. Mais qui était derrière la caméra pour filmer son ascension fulgurante ? Comment Banksy peut-il se permettre de présenter Mr Brainwash comme un imposteur quand celui-ci pourrait dévoiler de quoi l’identifier à la presse ? Théories en tout genre fleurissent partout sur le net : et si Mr Brainwash était Banksy ? Et si l’un et l’autre étaient de mèche, et si Mr Brainwash n’était qu’un prétexte pour dénoncer la marchandisation du street art ?

Loin d’être un chef d’œuvre, Faites le Mur ! a le mérite de remuer les méninges pour qui s’intéresse un peu au graff et à ses dérivés. Ce que j’en pense, c’est que Banksy démontre ici sa connaissance parfaite du système médiatique en dépeignant la fabrique d’un authentique imposteur.

Crédit photo :
Caruba

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Julie Desbiolles -


Réactions des internautes

khwezi
Vendredi 21 Janvier 2011, 15:48
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Ouais bof...
C'est marrant, moi j'ai aimé la construction et le montage du film, qui lui donne exactement ce qu'il a l'air d'être: un remake de Frankenstein, ou comment Banksy, par le hasard de la rencontre sollicitée a contribué a créer Mr Brainwash, sa creature monstrueuse ("Mr Brainwash is a phenomenon, and I don't mean it in a good way" Banksy).

Ensuite, pour préciser que le film n'était pas du tout censé être sur le graffiti, mais uniquement sur la récuperation du street art, via l'exemple de Mr Brainwash. La preuve ? Le titre original "Exit Through the gift shop" ironise sur l'obligation faite aux visiteurs des expos de passer par la boutique souvenir pour pouvoir sortir, en esperant ainsi leur faire depenser leur argent.

En outre, le sous titre original du film est "Comment le plus grand film sur l'histoire du Street art n'a jamais été fait" ("The true story of how the biggest film on street art in the history was never made").

Donc de A a Z le scenario alambiqué est prevue, calculé et deconcertant de lucidité et d'intelligence.

Et il faut reconnaitre a Banksy le fait qu'il ne se met pas en avant plus que cela, alors qu'il est notoire qu'il influence la pratique de milliers d'artistes.

Ah pour Finir, Sheppard Fairey est OBEY. OBEY Giant n'est pas un projet, c'est un pseudo d'artiste.

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khwezi
Vendredi 21 Janvier 2011, 15:51
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Re: Ouais bof...
Ah, et puis Mr Brainwash on aime ou pas, mais le traiter "d'imbécile" et de "sans talent", c'est un peu fort.

Le talent est une chose discutable de toute façon.
C'est là ou le film est intelligent: il montre et ne juge pas. Il laisse ce loisir de juger au spectateur, comme l'auteur de cette chronique, ou comme moi même.

C'est le propre d'une oeuvre d'art reussie, que de donner envie de réagir et de laisser la place à l'interpretation personnelle.

Donc le film me semble une grande reussite.

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Julie
Dimanche 23 Janvier 2011, 15:17
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Re: Ouais bof...
 Je me suis peut-être mal exprimée, mais le but de l'article était plus d'exprimer un point de vue personnel, ou plutôt une perception du film, que de le critiquer de manière objective et distante. Je pense que c'est un film très spécial dont la compréhension dépend de beaucoup de choses : la connaissance du graff, de Banksy, mais aussi des goût esthétiques (j'ai adoré ce film mais je persiste et signe : pour moi, le centre du film n'est surement pas son esthétique, même si je conçoit que la manière de filmer a un petit côté underground qui peut plaire). De même lorsque je parle de Mr Brainwash "imbécile et sans talent", c'est effectivement maladroit, mais ce que je voulais exprimer était moins un jugement que la manière dont il apparaît dans le film (mais là encore, chacun sa perception!)

En fait, je pense (et encore une fois, ça n'engage que moi) que le mérite de ce film c'est qu'il est sans prétention mais déclanche une sacrée réflexion, que ce soit au niveau du graff, de la place de Banksy, da la marchandisation du graff (j'ai récemment lu une interview sur FatCap où il racontait : "J'avais fait un pochoir sur un transformateur électrique dans le sud de Londres et récemment quelqu'un l'a découpé à la scie et revendu dans une salle de vente réputée pour 24000£; mais la même semaine le conseil municipal d'Islington a fait retirer 8 de mes derniers pochoirs sur une route." ), et les manières de le comprendre sont à peu près proportionnelles au nombre de fois où il a été vu...!

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