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Les Calanques : Un rare espace de liberté

Mercredi 29/09/2010 | Posté par Samir Akacha

Alors que Jean-Louis Borloo annonçait il y'a quelques jours que "l'affaire serait réglée pour la fin de l'année", la création du Parc National des Calanques suscite toujours le débat. Entre écologie, politique et liberté, rencontre avec Eric Solheim, Président du CIQ de Bonneveine.

Un parc national des calanques, pourquoi ?

L'idée est venue des scientifiques, car le site était en danger. Il y a une population importante qui vit à coté, la ville de Marseille notamment. Moi les Calanques je les ai fréquentées depuis tout gamin, c'est un espace de liberté assez rare à proximité d'une grande ville comme la notre. C'est plus facile de faire un parc national dans les Sévènes par exemple, avec peu de population. Entre Marseille et Cassis, c'est pas évident.
Il y a dix ans, on n'aurait pas pu créer ce parc comme ça, c'est pour ça que le Groupement d'Intérêt Public (GIP) a été créé, il y a eu une prise de conscience de la part des élus, alertés par les scientifiques. Il est devenu évident qu'il fallait créer des règles pour faire perdurer cet espace, face aux pressions. Les pressions économiques, comme avec les promoteurs, la pression de la population aussi, qui fréquente ces sites depuis toujours. Elle souhaite évidemment que rien ne change.
Il fallait donc créer un cadre, ça a commencé par la création du GIP. Il a été chargé ces dernières années de trouver avec tout ce petit monde une solution.

Quels sont les points de vue ?

Le rêve des scientifiques, c'est que plus personne n'aille dans les calanques, pour assurer sa préservation. Ce qui n'est pas possible d'un point de vue humain. Ensuite il y a les intérêts locaux, économiques, sociaux, politiques. Tant qu'on a été dans la concertation, en faisant le bilan de tout ce qu'il fallait faire ou ne pas faire, tout s'est bien passé.
Tout le monde est absolument d'accord pour préserver la faune et la flore, mais chacun veut conserver ses privilèges. Ça commence par les cabanoniers. Ils ont une vision un peu romantique de leur position. La création du parc va leur créer des contraintes, mais en même temps, ça leur amène une protection. D'accord, ils ne pourront pas faire ce qu'ils veulent, mais ils préserveront ce qu'ils ont, parce qu'ils ne sont que locataires.
Ensuite il y a les pêcheurs professionnels, qui disent qu'on peut pas leur interdire leur activité, c'est leur gagne pain. Il ne faut pas que ce soit une supercherie, un faux parc national. Il en faut un véritable, avec des moyens, avec des règles, qui doivent être fixées le plus justement possible, en conservant cette particularité d'un parc national à coté d'une ville comme Marseille.

Que représentent les Calanques aux yeux des gens ?

Les gens qui gravitent autour sont avides de liberté, mais en même temps la liberté veut dire beaucoup de choses. On a tout fait dans les Calanques. On a pêché comme on voulait, les lois ne sont pas les mêmes qu'ailleurs. Cette liberté là, elle n'a pas de prix, donc pour ces gens là c'est très difficile d'accepter une réglementation.
Dans ces calanques, j'ai passé ma jeunesse. On allait à la plage ou dans les collines. C'était une liberté incroyable quand on était gamin, beaucoup plus qu'aujourd'hui, car il y avait moins de Nintendo... Descendre dans les éboulis, c'est un plaisir incroyable, mais c'est massacreur pour la nature. On profitait du plaisir immédiat, on avait pas conscience des dégâts qu'on faisait. On ramassait des oursins. C'était interdit, mais on s'en foutait complètement. Aujourd'hui, il n'y en a plus ou presque.
Lorsqu'on est tout seul dans la montagne à cueillir des fleurs, on peut faire un bouquet, le ramener à sa maman, sa fiancée. Mais s'il y a un million de personnes et que chacun cueille son bouquet de fleur, et bien il n'y a plus de fleur, c'est tout.

Comment concilier les intérêts particuliers ?

Mettez vous dans la peau d'un promoteur. Il va voter pour la création du parc national, mais il voudra pouvoir construire ce qu'il veut en limite du parc, en faisant la promotion à ses clients de la vue sur le parc. Il va militer aussi pour la préservation de l'aigle de Bonelli, mais à la rigueur, juste pour que ses clients puissent le voir se poser dans son nid. Ce qui n'est pas envisageable. Les escaladeurs, eux, ont organisé une pétition mondiale pour avoir le droit d'escalader de partout. Tout le monde comprend l'intérêt des règles, mais pas pour soi. C'est humain. Mais la population est très favorable au parc national des calanques, elle comprend l'intérêt pour l'image de Marseille, et pour l'héritage que l'on peut offrir aux futures générations.

Propos recueillis par Samir Akacha

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Samir Akacha -

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