La sauvette made in China
Jeudi 19/02/2009 | Posté par Chen Yu (EJCM)
Ils travaillent 7 jours sur 7. Le dimanche, on les rencontre aux coins des rues ou sur les places. Ils viennent de Chine, ils sont commerçants, employés ou étudiants, et le week-end ils deviennent vendeurs à la sauvette.
13 heures, dimanche. Sur le marché à la sauvette en face de la Porte d’Aix, monsieur Zhu et sa femme attendent désespérément les clients. « Les affaires sont mauvaises, estime le vendeur chinois originaire de la région An Hui, l’une des provinces qui envoient le plus d'émigrés en Europe. En hiver on ne vend pas beaucoup. Ça sera beaucoup mieux en été car il y aura plus de touristes et les maillots de bain se vendent bien».
Zhu est employé dans un magasin chinois de vente en gros depuis 4 ans. Il a acheté à son patron un lot d’articles d’usage quotidien à bas prix (montres-bracelets, stylos, jouets...). Chaque week-end, il se rend à la Porte d’Aix avant 9 heures pour avoir un bon emplacement.
Depuis des années, la Porte d'Aix est occupée par les vendeurs à la sauvette. Au départ, il s’agissait surtout de retraités maghrébins qui trouvaient là le moyen d’arrondir leur petite pension de retraite. Au fil des années, ils ont été rejoints par des vendeurs plus jeunes et d’origines diverses. Un parking a été construit pour les déloger mais ils ont persisté autour. Les efforts des pouvoirs publics pour les déloger n’ont jamais vraiment abouti. Chaque week-end, ils reviennent.
Sur une vieille couverture, Monsieur Zhu place une vingtaine de produits, voilà tout son stand. Il garde à ses côtés un caddie pour ramasser ses articles en cas de visite de la police. Comme tous les autres vendeurs de la place, il n’a pas le droit de vendre à cet endroit. « Cela devient de plus en plus difficile pour nous. La police est plus sévère ces dernières années », constate Zhu. « En 2005 il y avait plus d’une dizaine de stands chinois comme le mien, et autant de vendeurs sur le Cours Belsunce, en face du Centre Bourse. Avec la rénovation du quartier, ils ont chassé la plupart des vendeurs et je suis le seul Chinois qui reste ici ».
Bien entendu, monsieur Zhu n’a pas de carte de commerçant et il ne parle pas français. Il sait qu’il prend des risques en vendant ainsi à la sauvette. Mais quand on connaît son faible salaire - moins de 800 euros dans la boutique où il travaille- il ne lui reste pas beaucoup de choix pour aider sa famille en France.
Beaucoup d’étudiants
Parmi ces vendeurs à la sauvette, on trouve également pas mal d’étudiants. Parlant mieux le français, ils étaient d’abord là pour aider leurs compatriotes. Au fur et à mesure, ils ont commencé à vendre pour leur propre compte. Leur statut et le fait qui parle français rendaient la police plus tolérante à leur égard.
Comme les autres, ils vont se fournir en articles à bas prix dans les bazars chinois du centre-ville. Mais ils sont plus mobiles que les autres vendeurs. Ils viennent surtout le week-end et profitent de l’été quand les affaires marchent bien pour se fixer à un endroit. En revanche, ils subissent tout autant la police.
« Avant 2006, chaque année, j’allais vendre des petits articles au grand marché aux puces, à Bougainville », raconte Wang, étudiant en France depuis 2002. « A l’époque, la plupart des vendeurs de rue chinois étaient des étudiants. Maintenant, ils sont peu nombreux car la police est de plus en plus sévère». Ayant été attrapé une fois par la police sur le Cours Belsunce, Wang a perdu tous ses articles. « Il me fallait presque 200 euros d’amendes pour récupérer les produits donc je les ai laissés au commissariat de Noailles». Si les étudiants ne risquent pas de perdre leur titre de séjour pour première effraction, la sanction financière est bien au-delà de leurs moyens.
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Par Tony Off