Marseille Bondy Blog Dakar Bondy Blog Neuilly Bondy Blog Lausanne Bondy Blog Business Bondy Blog Bondy Blog Lyon Bondy Blog Marseille Bondy Blog

Amal, journaliste tunisienne : "Aujourd'hui je ne me sens pas libre"

Mardi 25/10/2011 | Posté par Adeline Raynal

"Quelles évolutions pour la liberté de la presse depuis les révolutions arabes ?" Tel était le thème du troisième débat des Journées du Grand Reportage organisées la semaine dernière par le Club de la Presse Marseille Provence Alpes Sud. Adeline y assistait.

Samedi 15 octobre vers 15h30. Nous sommes au moins une quarantaine de personnes à nous installer dans de grands fauteuils en cuir couleur camel au siège du Conseil Général. Dans la salle de conférence, on trouve : des retraités, des étudiants, de simples curieux, des personnes engagées dans diverses causes... A l’image de cette dame qui a pris soin de distribuer des tracts d’invitation à un débat "contre la banalisation des idées d’extrême-droite" devant la sortie du métro St Just avant de venir se glisser dans la salle.

Du coté des intervenants, c’est un quatuor de quatre femmes, toutes journalistes dans des pays arabes, qui s’installent face à l’assemblée. C’est Jacqueline de Grandmaison, vice-présidente de l’Union des Clubs de la Presse de France et Francophones, et délégué régionale de Reporters Sans Frontières, qui occupe la place d’animatrice du débat.

Parmi les questions soulevées, celle de la situation actuelle des médias dans les pays touchés par le printemps arabe. Amal Bejaoui, journaliste à l’Agence Tunis Afrique Presse et membre du comité constitutif du premier syndicat des journalistes tunisiens, prend la parole la première. "Intégrer la liberté de la presse dans la nouvelle Constitution tunisienne est un souhait, mais pour l’instant seul un code de la presse a vu le jour. Certains sujets comme celui de la corruption restent difficiles d’accès", explique-t-elle.

Des militaires censeurs en Egypte
"La structure médiatique n’a pas beaucoup changé depuis la chute d’Hosni Moubarak en février dernier. Les chefs militaires ont accès aux imprimeries de presse et assurent le rôle de censeurs", ajoute Samar Al Gamal, directrice de rédaction adjointe à Al Ahram Hebdo, en Egypte. Selon elle, toutefois, les rédacteurs en chef, anciens partisans du régime, ont quasiment tous quitté leurs fonctions, contrairement à ceux en place en Tunisie.

"Aujourd’hui je ne me sens pas libre car ce sont les mêmes personnes qui dirigent les médias que sous Ben Ali", confirme Amal Bejaoui. Elle indique que la situation de la presse est précaire dans son pays, que les journalistes sont plutôt divisés.

D’après Zeina el Tibi, journaliste franco-libanaise, "le problème c’est que l’expression dépend des patrons de presse, qui, lorsqu’ils sont directement issus du monde politique, orientent le point de vue". Elle déclare également qu’outre les facteurs politiques, il faut tenir compte des points de vue religieux. "Persepolis", le film d’animation de la cinéaste d’origine iranienne Marjane Satrapi, a par exemple dû être interdit au Liban suite aux protestations des islamistes. Ils s’offusquaient du fait que Dieu soit représenté (sous la forme d’un vieux monsieur à la longue barbe), considérant que cela est interdit par leurs préceptes religieux.

Grâce à la présence de Nina Hubinet - jeune journaliste française, correspondante de "La Croix" au Caire - l’attitude à l’égard des étrangers en Egypte a été abordée. Elle raconte que pendant les manifestations, les étrangers ont été accusés 
par des contestataires d’être des espions au service du régime en place. C’est à l’égard des étrangers en général, pas seulement des journalistes, que des suspicions ont existé. Aujourd’hui, elle estime que les journalistes étrangers sont plus libres que ceux égyptiens. 


La France "sous surveillance" 
En début de débat, l’animatrice rappelait que la France occupe la 44ème place dans le classement mondial des pays selon la liberté d’expression, réalisé par Reporters Sans Frontières en 2010. D’ailleurs, depuis six ans, notre pays n’a cessé de chuter passant de la 19ème place en 2004 à la 44ème en 2010. Nous faisons également partie des pays "sous surveillance" quant à la liberté d’expression sur Internet, aux côtés de la Russie, la Thaïlande, la Lybie…
Alors que le débat touche à sa fin, Samar Al Gamal lance : "Désolée, mais pour moi, la France n’est plus un modèle en terme de droits."

Voir ici la carte de la liberté de la presse dans le monde éditée par RSF.




crédit photo : Frédéric della Faille

Ceux qui ont lu cet article ont aussi aimé :

Adeline Raynal -


Réactions des internautes

Romuald
Mardi 25 Octobre 2011, 07:49
Signaler un abus
Le film Persepolis a également fait l'objet d'une très vive polémique en Tunisie, la justice tunisienne enquêtant même sur la chaîne Nessma TV tandis que des appels à la haine ont été lancés par des milliers de « barbus ».

De même, on se rappellera que la grande mosquée de Paris et l'UOIF avaient déposé plainte contre Charlie Hebdo, parce que le journal satirique avait osé publié les fameuses caricatures du prophète sanguinaire des musulmans. Procès perdu... par les plaignants, du reste.


Il me paraît en tout cas déplacé de comparer la situation de la liberté d'expression sur internet, avec celle de la Libye, de la Russie ou de la Thaïlande.
Je n'ai jamais été autant censuré que sur le Bondy Blog, version Bondy... 

Rue89, Médiapart, Bakchich peuvent publier des articles très critiques (pour Bakchich, il convient d'en parler au passé puisqu'ils ont mis la clé sous la porte à cause de problèmes financiers); et il existe de façon générale une presse d'opposition.
De même que l'on trouve des sites farouchement à gauche, d'autres très à droite, des sites et forums barbus etc etc.


Par ailleurs, je note que, sur la carte établie par RESF, la France figure parmi les pays où la situation de la presse est plutôt bonne.
Comment peut-on avoir le toupet de comparer avec la Libye (en noir), la Thaïlande ou la Russie  (en rouge) ??!

Répondre -

Amélie
Mardi 25 Octobre 2011, 13:15
Signaler un abus
Re:
Tu confonds RSF et RESF. 

Répondre -

Adeline Raynal
Mardi 25 Octobre 2011, 19:30
Signaler un abus
infos RSF
Bonjour,

Je faisais référence à la rubrique "ennemis d'Internet" présente sur rsf.org  (site de Reporters Sans Frontières) , en bas de page.
Si vous ouvrez le petit menu déroulant, vous constaterez que la France fait partie de la sous-rubrique "pays sous surveillance" tout comme la Lybie, la Russie, la Turquie... Cela porte seulement sur la liberté d'expression sur Internet. Après, certainement que le niveau de vigilance doit varier.

Cordialement,

Adeline

Répondre -

Romuald
Mardi 25 Octobre 2011, 21:33
Signaler un abus
Re: infos RSF
Oui zut, j'ai confondu RESF et RSF ! oups.


Pour autant, dans certains pays, internet est verrouillé; dans mon pays d'origine par ex (Vietnam), les critiques lancées sur internet par des opposants à la dictature communiste sont suivies de l'arrestation par la Sécurité publique des auteurs de ces critiques.

Les médias et la presse sont sous contrôle d'Etat; les journalistes osant enquêter sur la corruption frappant les fonctionnaires viets sont soient licenciés, soit, pire, emprisonnés.

Les blogueurs sont eux traqués sans répit lorsqu'ils critiquent le régime, et même les blogs de la diaspora vietnamienne sont régulièrement piratés par les autorités viets.
De nombreux sites occidentaux sont bloqués, notamment ceux relatifs aux droits de l'Homme, car considérés comme subversifs.


On est donc à des années-lumières de ce qu'il se passe en France...

Répondre -

Amélie
Mardi 25 Octobre 2011, 21:52
Signaler un abus
Re: infos RSF
 En effet Adeline, c'est parlant. 
En terme de liberté de la presse, la France, toujours selon RSF, est en 44ème position. Je crois que cela se passe de commentaires.
http://fr.rsf.org/press-freedom-index-2010,1034.html



Répondre -

Amélie
Mardi 25 Octobre 2011, 22:05
Signaler un abus
Re: infos RSF
 Désolée, je reprends la fin de l'article...

Répondre -

Romuald
Mardi 25 Octobre 2011, 23:50
Signaler un abus
Re: infos RSF
Libye : n° 160 sur 178
Russie : n° 140
Turquie : n°138

Quant au Vietnam que j'évoquais plus haut : n°165 sur 178 toujours...



La France est donc vers le haut de la liste, plutôt que vers le bas.

Quant à l'Europe du Nord, elle semble ultra-tolérante.
Cela ne l'empêche pas d'être frappée par des attentats (celui perpétré par Breivik, ceux commis par des ou tentés d'être commis par des « islamistes »), ou de voir fleurir des menaces de mort (contre les caricatures de Mahomet, contre Ayaan Hirsi Alimi).

Répondre -

Amélie
Mardi 8 Novembre 2011, 00:29
Signaler un abus
Re: infos RSF
Encore heureux que la France se trouve en haut de la liste ! Pour autant son rang n'est pas enviable. La majorité de la presse est subventionnée, d'où la collusion de certains journalistes avec les pouvoirs. L'auto-censure se manifeste également dans les partis pris parfois idéologiques des journalistes. La presse anglo-saxonne est plus factuelle, ce qui permet des analyses moins biaisées. 

Répondre -

Amélie
Mardi 8 Novembre 2011, 02:08
Signaler un abus
Cumulards
 Un peu d'eau au moulin :
http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2011/11/06/le-cumul-des-mandats-dans-les-medias-fausse-t-il-le-debat_1598889_3236.html

J'aime bien ce commentaire d'une lectrice :
"1° De vieux mâles blancs peu pressés de partir à la retraite, qu'on va remplacer de toute façon par un concours de mannequinat,
2° Des journalistes qui se prennent pour des vedettes, dont les invités deviennent les faire-valoir, Le meilleur moyen de calmer leurs égos sur-dimensionnés serait d'éteindre le poste de télévision. Une grève de télé... qui aura du mal a trouver suffisamment de volontaires." 


Répondre -