Au collège, les Centraliens jouent les parrains
Lundi 06/04/2009 | Posté par Jean-Paul Duarte
Des élèves ingénieurs de Centrale Marseille au collège Prévert, des collégiens à Centrale, les Échanges Phocéens sont une main tendue des futurs ingénieurs à ceux qui pourraient le devenir.
À cette heure-là le collège Jacques Prévert de Frais Vallon est pratiquement désert. Ils sont huit, six filles et deux garçons de 4ème, à préférer rester en classe après les cours pour passer 1h30 à 2 heures par semaine avec des élèves ingénieurs de l'École Centrale de Marseille. Pas de soutien scolaire pour ces collégiens volontaires et méritants, mais un accompagnement hebdomadaire "d'éveil à la curiosité" selon Harold, un des tuteurs centraliens. "Nous sommes là pour transmettre de la culture générale, pas pour remplacer leurs professeurs". Shina, une élève du groupe, le résume ainsi : "Ici, on apprend des choses que l'on n'a pas la possibilité d'apprendre ailleurs".
Car l'originalité de l'initiative réside dans le contenu des séances. Pas de problème de math à résoudre ou d'exposé à préparer, d'abord ici on discute, on dit des choses qu'on ne pourrait pas dire en classe, on propose, on imagine, on s'imagine. La séance débute toujours par un débat. Ce soir, les élèves traitent de l'épineuse question des notes. Visiblement, la question a du mal à trouver des arguments tranchés. "Parfois, raconte Harold, lorsque le débat prend bien et qu'il y a deux camps, des pour et des contre, on inverse les rôles. On leur fait tenir les arguments adverses. C'est très drôle car à la fin ils ne savent plus très bien ce qu'ils défendaient au début. Le but est qu'ils apprennent à argumenter".
Le débat se conclut par des : "les notes c'est bien" ou "les notes c'est pas bien"... pas très convaincus..., on en reste là pour le débat et on passe aux choses plus sérieuses. Maxime, étudiant de deuxième année, passionné de cinéma, intervient dans les différents groupes. Il revient sur les précédentes séances, où il a abordé avec les élèves l'histoire du cinéma : passage du muet au parlant, du parlant en noir et blanc à la couleur. Et maintenant, quoi d'autres ? Un tour de table des collégiens laisse envisager des pistes innovantes dont l'industrie du cinéma pourrait s'inspirer. Entre l'eau qui sort de l'écran et le vent dans les cheveux, les idées fusent même si, comme le rappel Pierre, l'autre tuteur permanent, l'eau, le vent et autres effets spéciaux existent déjà dans des salles comme le Futuroscope. Mais pourquoi pas alors l'envisager aussi dans le salon ?
Maxime relance "et alors maintenant comment voyez-vous le cinéma du futur ?". Silence. Maxime insiste. Thoinia ose : "Et si dans un film il y a une pizza on sent aussi la pizza ?" Super ! Approuvent les Centraliens. Le cinema du futur sera donc un cinéma où tous les sens seront sollicités. Forts de ces avancées technologiques majeures, les collégiens se lancent en binômes dans l'écriture d'un scénario intégrant leurs propositions, chapeautés par leurs tuteurs. Ce module cinéma fait suite à un module sur les médias et à un autre sur les sciences. Une manière d'aborder des thématiques dans un esprit de découverte et d'échange. Et pendant les vacances, pour ceux qui veulent, des stages sont organisés dans les locaux de Centrale : en février, les élèves y ont ainsi découvert le théâtre et la photographie. Et c'était comment ? Thoinia en est revenue enchantée : "c'était trop bien, les gens étaient très gentils avec nous, tout le monde nous faisait des sourires". Et qu'est ce qu'elle a préféré ? : "les pauses"...
Cette initiative vise à promouvoir l'égalité des chances en partant du constat suivant : 11% des étudiants en grandes écoles sont des enfants d'ouvriers et d'employés alors qu'ils représentent 60% de la population active. Permettre ainsi aux élèves de ZEP de fréquenter de brillants étudiants, c'est réellement rendre possible leur intégration aux études supérieures. La disponibilité des futurs ingénieurs ne fera bien sûr pas tout, et pour arriver au moins jusqu'en classe prépa il leur faudra du courage et de la volonté. Et peut-être qu'un jour ils seront, à leur tour, tuteurs.
Jean-Paul Duarte
Échange Phocéen est le projet égalité des chances de l'École Centrale Marseille
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Par Tony Off