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David ou la détermination d’être libre

Jeudi 26/04/2012 | Posté par Cécile de Ronde

HANDICAPABLES - Ces jours-ci, le MBB vous propose un dossier consacré au handicap. Cécile a interrogé des personnes touchées par différents handicaps, elle nous mène à la rencontre de chacun. Voici le portrait de David qui vit à Mimet.

Irréversiblement blessé pour avoir protégé deux ados d’hommes armés, David Hernandez est l’exemple de la combativité pacifique. Après des essais avortés de transports en commun, il trouve une solution à l’accessibilité : l’autonomie grâce à une voiture multi fonctions.

A 20 ans, il marchait. Jusqu’à ces deux coups de carabine artisanale pour avoir pris la défense du plus faible. La colonne vertébrale est touchée, il ne sentira plus jamais rien au dessous du thorax. Il passe un an et demi au Centre de Rééducation Fonctionnelle de Valmante et apprend à vivre paraplégique. "Des plans inclinés pour pouvoir m’asseoir, de la kiné, la maîtrise du fauteuil roulant." Téméraire, il dévale des pentes, se confronte à de petits escaliers : "Je m’entrainais à tomber, remonter sur le siège, retomber."

L’ancien sportif habitait au 8ème. Revenu à la cité de Malpassé, David brave six marches d’immeuble, des escaliers répugnants, les pannes d’ascenseur. Il se sent tributaire des copains qui le montent et le descendent en fauteuil. "Tout ce que je pouvais faire seul, je le faisais : les transferts (d’un siège à un autre), m’habiller. Je ne demandais d’aide que quand je ne pouvais pas faire autrement."

Il reste quatre années là-haut. A cette époque pas de statut prioritaire pour un appartement en rez-de-chaussée, un choix réduit. Il faut patienter jusqu’à ce qu’il s’en libère dans le quartier : "pour ne pas m’isoler. Et pour le soutien... Tous mes amis vivaient là."


La force de tout recommencer
Il faut ensuite aménager l’appartement des Lavandes : salle de bains, cuisine à portée de main, à l’extérieur petite pente douce pour l’accès en fauteuil. "J’y suis arrivé petit à petit avec une aide aux travaux du Conseil Général." Mais toujours ces problèmes d’accessibilité dehors : trottoirs trop hauts, véhicules bloquant le passage, obligation de trouver une issue, de descendre sur la chaussée. Il essaie une fois ou deux les bus et escalators du métro non adaptés, et abandonne : "Ça m’obligeait à disposer d’une aide."

Sa famille l’aide à acquérir une voiture. Ses revenus d’Allocation Adulte Handicapé (AAH) sont très faibles, au seuil de la pauvreté. "J’étais incapable de travailler. Les pathologies de la paraplégie entrainent des problèmes d’escarres, des maux de ventre, des malaises imprévisibles." Un travail à temps partiel signifie aussi se lever, se préparer, s’y rendre, repartir. "Alors, un plein temps !"

Sa première voiture d’occasion lui donne une autonomie de déplacement précieuse : "Je n’étais plus obligé de dépendre de structures qui te font attendre des heures ou de grands détours de parcours." Elle lui permet de construire sa propre activité, un objectif vital.

Difficulté du handicap : il est multiforme : "Chaque cas a sa propre singularité. Les problèmes ne sont pas les mêmes pour les aveugles, infirmes, malentendants. Pour les gens en fauteuil : marches, escaliers, ascenseurs, portes trop petites, hauteurs. On demande plutôt aux rendez-vous de venir à nous."

Sa voiture actuelle est confortable et lui sert de bureau. Avec il se déplace, il reçoit – ce qui lui évite de sortir 
  il honore ses rendez-vous professionnels. Organisateur d’événementiel pour l’Art Plus Fort que le Handicap (AFQH), et auteur compositeur, le fait de pouvoir aller chanter, rencontrer des gens, assumer ses rendez-vous et développer un projet de vie : "c’était ce qu’il fallait pour éviter de se lamenter et dépasser mon handicap."

Un homme discret nous apporte des cafés dans la voiture. "Magid, dit-il avec un chaud sourire, un ami qui m’a connu depuis le tout début, qui m’a accompagné."


Humour et complémentarité
Il suggère que les personnes en charge de l’accessibilité : architectes, financeurs, élus, essaient un fauteuil une journée : portes, WC, transport. .

Le train fait des progrès, "mais dans le cas où le paraplégique souffre de maux de ventre, quelle est la solution de repli s’il se souille ?", demande-t-il. "On emboucane les gens du fait qu’on ne peut pas se changer. Arrivé à destination aucun taxi ne veut vous prendre. Ça devient dramatique : comment arriver à destination ?" Il voit un wagon sanitaire réservé, compris dans le prix du trajet. .

Et pointe : "pour les hôtels, il y a nécessité de reconsidérer l’agrément pour l’accueil des handicapés, d’aller du cas le plus lourd vers le plus léger." Les installations ne convenant pas à tous les handicaps : "cela passe par de l’équipement, et sa connaissance. On devrait s’inspirer des adaptations que nous trouvons pour nous débrouiller. Exemple : j’ai construit un système avec mon beau-père qui me rend autonome aux toilettes."

Dans Intouchables, il reconnaît l’humour utilisé au quotidien par les handicapés : "la dérision permet d’évacuer le côté difficile de la maladie." Quant à l’effet qu’a pu produire le film : "il a peut-être touché des gens pas habitués au fauteuil…" L’impact est dur à évaluer pour lui : "j’ai vécu cette situation sans les moyens de ce type qui s’emmerde. J’ai aussi connu ce que vit Omar Sy puisque je viens des cités."

Il apprécie qu’on y montre la complémentarité de personnes valides et en situation de handicap : "l’un a la tête, l’autre les jambes." Comme cet ami aveugle qui pousse son fauteuil et qu’il guide. "Le bonheur, l’envie de vouloir avancer est dans la tête, pense-t-il. On transmet tous des choses. Par mon histoire, je remonte le moral."

Il a vu ces danseurs sur scène dont l’un n’a qu’un bras, l’autre une seule jambe : "à deux ils formaient un corps entier. Tout sauf du misérabilisme. La personne handicapée a besoin d’aide et de dignité. Pas de pitié." 

Son leitmotiv, avoir une passion et la vivre : "être un phare, donner de l’espoir aux gens. Montrer qu’on peut apprend à vivre avec la souffrance, la mettre au second plan." 




Crédit photo :
 Art plus Fort Que le Handicap




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Cécile de Ronde -


Réactions des internautes

Romuald
Lundi 30 Avril 2012, 12:25
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Le courage de cet homme force l'admiration !
Je retrouve cette force et cette volonté aussi chez les soldats français blessés sur le théâtre afghan notamment.


Mon père, kiné à la retraite et qui s'est occupé durant une grande partie de sa carrière des enfants polyhandicapés (handicapés physiques et mentaux), est aujourd'hui bénévole dans une APAJH.
On en parlait encore il y a quelques jours, il me disait que les institutions ont pour obligation de se mettre aux normes d'ici à 2015, afin de favoriser l'accès aux handicapés...
Mais quand on voit que les subventions à ce type d'organismes baissent au fil des années... 


Sinon, même si c'est symbolique, j'ai appris qu'en Angleterre est en poste un tétraplégique, consul général français à Londres, M. Édouard Braine.
Et je ne sais plus dans quel coin de France, est en fonction un préfet lui aussi tétraplégique.


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