le Marché du Soleil, nouveau squat commerçant
Mercredi 18/03/2009 | Posté par Benoît Gilles
Temple du commerce oriental, le Marché du Soleil a été partiellement détruit par un incendie le 18 juin dernier. Depuis, les commerçants campaient dehors. Mardi, ils ont décidé de rouvrir le Marché sans autorisation.
Le rideau de fer est en biais. A l’intérieur, les ballots de marchandises des commerçants attendent encore d’être déballés sur les étales de fortune, rue du Bon Pasteur. Mais, aujourd’hui, c’est relâche. Les commerçants de l’ancien Marché du Soleil ont décidé d’organiser le squat de leur ancien local. Depuis le 18 juin dernier, date de l’incendie qui l’a partiellement détruit, le rideau de fer était resté baissé.
Georges Dahan, le propriétaire, avait tout juste autorisé certains d’entre eux à utiliser le couloir pour entreposer leurs stocks. «Au bout d’un moment, on en a eu marre d’être balader. Les élus, ils n’ont de la réactivité que lorsqu’il faut coller des affiches pour leur campagne, s’indigne Omar Djellil, un voisin et acteur associatif qui a pris fait et cause pour les commerçants. Leur seule proposition concrète, c’est de nous mettre à Bougainville, sur le site de l’ancienne fourrière. Sous des tentes ! Dans du précaire ! Ici, les commerçants avaient un certain confort. Et puis, la clientèle a ses habitudes ici, pas là-bas où il n’y a rien».
Effectivement, les familles maghrébines viennent parfois de très loin pour trouver les produits orientaux qui ont fait la célébrité du lieu. Depuis 1989, on vient d’Avignon et même parfois de Lyon pour acheter robes de soirées, poufs, plateau à thé ou Nike en affaires.
Abdelak Abed, le président de l’Union des commerçants du Marché du Soleil, organise la visite pour la presse venue en nombre. «Vous voyez, il n’y a qu’une petite partie du marché qui a été détruite par l’incendie. Et, depuis, le propriétaire n’a rien fait alors qu’il a touché beaucoup d’argent de l’assurance».
On passe au milieu des galeries autrefois animées et aujourd’hui couvertes de détritus. Déjà, un ou deux commerçants ont pris des balais pour dégager les allées. A l’entrée, Essa El Soghayer se désole. Depuis 91, il tient un petit snack, désormais envahi par la poussière. «J’avais investi pas mal d’argent en matériel. Et, aujourd’hui, je ne peux rien faire alors que tout est intact. Il suffit d’un coup de chiffon et je redémarre».
Tôles tordues et rats géants
La solution que préconisent les commerçants a l’avantage de la simplicité. Ils veulent déblayer la partie du Marché encore préservée et monter un mur de séparation avec la partie sinistrée. «En presque un an, Monsieur Dahan n’a pratiquement rien fait. De temps en temps, on voit un ouvrier et c’est tout. Nous, si on prend un main le chantier, ce sera fini en quinze jours, un mois», affirme Abdelak Abed.
Effectivement, quand on arrive dans la partie détruite, le spectacle est navrant : flaques nauséabondes, tôles tordues par la chaleur, poutres calcinées et, partout une odeur âcre d’abandon. «Ma parole, c’est l’Irak !», plaisante un quidam. «Et encore vous n’avez pas vu les rats qui vivent là, s’indigne Omar Djellil, qui habite au-dessus. Longs comme mon bras, ils sont tellement gros qu’on dirait des chats».
La visite se prolonge à l’étage, près de la petite mosquée des commerçants. On y découvre de curieux studios lambrissés. «Il y en avait une 50 comme ça que le propriétaire était en train d’aménager». La surface au sol ne dépasse pas les 5 m2. Les lits en mezzanine ne sont qu’à 30 cm du plafond. «C’est des duplex !», rigole l’un des commerçants. Tout cela ressemble fort à l’hôtel meublé d’un marchand de sommeil. On n’en saura rien puisque tout a été détruit.
Et visiblement, le propriétaire a d’autres projets pour ce site. C’est en tout cas ce que l’on indique du côté de la mairie. «Monsieur Dahan nous a présenté un projet très intéressant de galerie marchande sur 1000 m2 au-dessus d’un parking de 120 places, détaille Solange Biaggi, adjointe au maire UMP déléguée au commerce. C’est un projet séduisant qui est actuellement à l’étude. Comme le Marché se trouve dans le périmètre d’Euroméditerranée, la municipalité n’est pas la seule à décider. En tout cas, Monsieur Dahan prévoit au moins deux ans de travaux. Les commerçants y auront leur place mais je suis consciente qu’attendre aussi longtemps est compliqué pour eux. On essaie de leur trouver des solutions au cas par cas».
En attendant, le site est toujours frappé d’un arrêté de péril et d’un second qui interdit l’ouverture au public. A tout moment, la police nationale peut décider de déloger les squatteurs. Pour l’heure, ils n’en ont cure et continuent de balayer.
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Par Tony Off