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Les mendiants mis à l’amende

Lundi 24/10/2011 | Posté par Jan Cyril Salemi

La mairie de Marseille a adopté un arrêté qui interdit la mendicité dans tout le centre-ville. En réaction, les Communautés d’Emmaüs appellent à des séances de mendicité solidaire jusqu’au retrait du texte. La première avait lieu jeudi 20 octobre devant la mairie. Jan Cyril y était.

Lundi 17 octobre, Journée Mondiale du refus de la misère. La mairie de Marseille a choisi de célébrer à sa manière cette manifestation. Elle va même plus loin : refuser la misère n’est pas suffisant, la municipalité a décidé de l’interdire. Le vendredi 14 octobre, elle a promulgué un arrêté qui réprime toute mendicité en centre-ville. Le périmètre va de la gare Saint-Charles jusqu’au stade Vélodrome, en passant par la Joliette et le Vieux-Port. Les contrevenants sont passibles d’une amende de 38 euros.

Cette décision, annoncée précisément le 17 octobre, a suscité une vague d’indignation. Peut-être dépassée par l’ampleur des réactions hostiles, la ville de Marseille a même voulu vérifier la popularité de cette mesure. Elle a édité un sondage sur son site internet, et pour le moment le verdict est sans appel : 26% des votants sont favorables à l’arrêté, 74% y sont opposés.

“Tranquillité et sécurité publique”
Cet arrêté anti-mendicité, qui selon la rhétorique municipale est un arrêté relatif à "la tranquillité et la sécurité publique” a été aussitôt condamné par les Communautés Emmaüs de la ville, qui ont dénoncé “une véritable guerre aux pauvres”.
Jeudi, à l’appel d’Emmaüs, soutenu par la Fondation Abbé Pierre, et en présence de Médecins du Monde ou de la Ligue des Droits de l’Homme, environ trois cents personnes étaient réunies pour manifester leur opposition au texte.
Rassemblées devant les portes de la mairie, elles ont organisé une séance de mendicité solidaire. Tant que l’arrêté ne sera pas levé, Emmaüs tiendra ces séances de mendicité chaque jeudi.

"Un bain de misère"
Au son de cuillères tapées contre des casseroles, les militants passent sous le balcon de l’Hôtel de Ville. D’autres agitent des boîtes en métal remplies de pièces de monnaie. Donne qui peut, donne qui veut. Les intervenants se succèdent au micro. La Ligue des Droits de l’Homme annonce qu’elle va engager une action en justice. On entend des témoignages sur les premières personnes interpellées à cause du nouveau dispositif.

Un homme saisit le micro : “Moi, je n’ai jamais fait de prison, je vis dans la rue. Maintenant, Monsieur le maire m’oblige à devenir un délinquant. Il veut la guerre ? Va pour la guerre, je vais lui faire payer ça dans un bain de misère.”
Un autre tient une pancarte “Mendiant solidaire”. Sur leurs écriteaux, certains font l’aumône des 38 euros qu’il leur manque pour payer l’amende. Une petite pièce pour vivre ? Non, une grosse somme pour mourir.



On commence à servir du café, de la soupe et à distribuer du pain. La police observe tout cela de loin. Christine, la cinquantaine, s’approche de moi, avec son portable à la main. “On est peut-être dans la galère, mais on a bien le droit d’avoir un téléphone, quand même, non ?” “Bien sûr”, je lui réponds en souriant.

Culture et dignité
Christine est infirmière, elle est venue là toute seule, d’elle-même, “par solidarité, et aussi parce que ça me fait retrouver ma dignité.” Non pas qu’elle l’ait perdue, mais elle galère. Malgré ses revenus, elle ne s’en sort pas. Et elle est remontée. “Ils veulent quoi avec ça ? Ils veulent nous pousser au vol ? Déjà, regardez les bancs, ici sur le Vieux-Port. Ils ont tous les barreaux. Pour empêcher les gens de s’allonger. On est déjà à genoux, et ils veulent en plus qu’on soit par terre. Ils parlent de 2013, la culture. Mais la culture, c’est d’abord de permettre aux gens de vivre dans la dignité.
Moi, j’ai cinq enfants. J’en ai un qui fait encore des études. J’ai dû sortir 800 euros pour l’inscription. L’autre jour, j’avais besoin de médicaments. 28 euros. J’ai pas pu les payer, je les ai pas pris. Mais je vous dis tout ça, à vous, vous êtes peut-être un RG ?”

Je la rassure, mais Christine s’en fout. Elle continue à raconter. Elle dirait la même chose à un RG, un flic, un préfet, le maire ou un ministre.
De loin, les policiers observent toujours. Cette fois-là, ils n’ont arrêté personne.


Mendiants Solidaires. Pauvreté + Précarité, c'est ça la vraie insécurité.




crédit photos : Jan Cyril Salemi

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Jan Cyril Salemi -


Réactions des internautes

Romuald
Lundi 24 Octobre 2011, 12:52
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Montpellier et la Rochelle, villes de gauche, avaient également émis de tels arrêts anti-mendicité au milieu des années '90.

Or, à l'époque, il ne devait pas y avoir énormément de « Roms ».
Car cessons l'hypocrisie, dans de nombreuses métropole, les myriades de Roms qui sévissent dans les métros, en surface, dans les commerces, constituent une nuisance devenue ingérable, d'autant qu'il s'agit de mineur(e)s piloté(e)s par de véritables mafias.

Strictement rien à voir donc avec les SDF contraints de mendier, de façon isolée voire en groupe de façon passive, car virés de leur boulot, par leur épouse et même leur famille.



A celles et ceux qui s'offusqueraient de mes propos, je rappelle que le chantre de la lutte contre les discriminations, Karim Zeribi, patron de la RTM, ex-PS, néo-EELV, a tenu des propos très durs dans une émission de radio à grande écoute, sans que les assoc communautaristes antiracistes ne réagissent.

Pour mémoire, ou info, lire ici : http://www.med-in-marseille.info/spip.php?article1506


Soit ses propos sont indignes auquel cas c'est une preuve de plus de l'idéologie faussement antiraciste véhiculée par ces assoc subventionnées (la clique des SOS Racisme, MRAP, LDH etc), soit il a asséné certaines vérités que n'ont pas osé contredire ces assoc estampillées « antiracistes ».

Je rappelle au passage que le MRAP a perdu un procès intenté à Yves Calvi et à Xavier Raufer (criminologue) par le MRAP, à la suite de propos que Raufer a tenus sur les Roms dans l'émission C dans l'Air.


N'oublions pas non plus la totale hypocrisie de la gauche à ce sujet.

Que ce soit Aubry qui, l'été 2010, martelait à l'adresse de Sarkozy que les Roms sont des êtres humains, sous-entendus qu'ils ne doivent pas être expulsés; elle qui en sa qualité de présidente de Lille Métrpole (communauté urbaine), avait réclamé du préfet du Nord qu'il expulse, dans l'urgence, des Roms squattant illégalement un terrain communal.
Ou encore Ayrault, patron du groupe PS à l'Assemblée, maire de Nantes, ville condamnée à indemniser à hauteur de 300€ les Roms illégalement expulsés.

En septembre 2010, le site du Courrier des Balkans avait publié une « carte de France de la honte » sur laquelle étaient recensées toutes les expulsions de Roms survenues au cours de l'été 2010.
En vérifiant la couleur politique de ces villes, il s'est avéré que, sur 26 ou 27 municipalités je n'ai plus le nombre exact en tête, 24 étaient de gauche (PS, Divers gauche notamment], 2 UMP (Aix-en-Pce et une commune du 78) et une MoDem......

Même constat quant aux frictions survenant entre municipalités, et gens du voyage (« gitans »).


Je peux fournir des faits précis, avec liens, si nécessaire.

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Jan Cyril Salemi
Mardi 25 Octobre 2011, 01:57
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Re:
 Salut, 

Je contesterai pas tes chiffres ni tes sources. Que ces décisions soient prises par des mairies de gauche ou de droite, ce n'est pas ça le plus important. Tu mets en avant le fait que beaucoup de municipalités (ou de personnalités) de gauche prennent de telles dispositions, et tu as raison de le faire remarquer.

N'oublie pas tout de même que beaucoup de municipalités de droite les prennent aussi, et je pourrais te citer le cas, que tu connais sûrement, de la municipalité (UMP) de Nogent sur Marne qui a pris un arrêté pour interdire de fouiller dans les poubelles.

L'arrêté pris par la mairie de Marseille est le premier du genre dans la ville, et le maire, jusqu'alors avait toujours garanti qu'il n'en prendrait jamais (au nom de la tradition d'accueil de la ville, assurait-il).
Cet arrêté vise, littéralement, "toute forme de sollicitation ou appel à la quête de nature à entraver la libre circulation des personnes".
Il est bien mentionné "toute forme". Quant à "l'entrave à la libre circulation des personnes", tu admettras que c'est une notion très subjective, qui est laissée à l'appréciation des policiers en charge d'appliquer le texte.

Dans ton commentaire, tu te focalises principalement sur les Roms qui, dis-tu, "constituent une nuisance devenue ingérable". Comme tu le sais sans doute, la loi réprime déjà la mendicité dite agressive, (voir ici l'article de loi) tout comme elle réprime le fait d'exploiter la mendicité des mineurs (voir ici l'article de loi). 

Avec cet arrêté municipal, la mairie de Marseille criminalise TOUS les actes de mendicité. Pas seulement ceux qui tombent déjà sous le coup de la loi (et pour cause, la loi existe déjà pour ces cas-là). Tous ceux qui sont contraints de mendier pour vivre sont concernés par l'application de cette mesure. Les "myriades de Roms" (selon tes propres mots), autant que tous les autres.

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Romuald
Mardi 25 Octobre 2011, 07:35
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Re:
Cet arrêté est parfaitement injuste et je te rejoins sur ce point, mais si j'ai insisté sur les Roms, c'est parce que, dans ton article, il n'en est à aucun moment question.

Or là est l'injustice, puisque cet arrêté cible tous mendiants, alors que ceux qui se rendent coupables de mendicité agressive ne sont pas les prénommées Christine que tu interviewes ou autre SDF qui a exprimé sa colère au micro.

Et tu sais parfaitement que, malgré les textes de loi que tu cites, ils sont inapplicables puisque ces délits sont commis par des mineurs, intouchables, inexpulsables, protégés qu'ils sont par une myriade de biens-pensants.


Et si j'ai évoqué le cas de ces municipalités de gauche qui, au niveau local, se « débarrassent » de cette mendicité agressive en expulsant avec usage de la force publique, c'est pour signaler cette hypocrisie consistant pour les responsables de gauche à hurler, au niveau national, à la stigmatisation lorsqu'est pointée du doigt la délinquance des Roms (par Guéant, par ex, ou Sarkozy) ou encore quand des propositions d'expulsions sont émises au plan national par la droite...

J'ai encore en tête les vigoureuses protestations de la Luxembourgeoise Reding à propos du traitement des Roms par notre pays*, et ce, alors que le Luxembourg interdit aux Roms, notamment, de résider sur le sol luxembourgeois...

* Les Roms sont à ce point maltraités, qu'ils bénéficient de primes au retour volontaire (2.000€/adulte seul, 3.500€/couple, 1.000€/enfant et 500€/enfant au-delà du 3ème) ou de l'ARH (aide au retour humanitaire : 300€/adulte, 100€enfant), des aides à l'insertion (7.000€ maxi, mais cela peut monter jusqu'à 20.000€ suivant le pays d'origine); avec, en sus, des frais de transport assurés par l'Etat.
Sans oublier la prise en charge des soins, la possibilité de toucher des allocations familiales, etc etc; voir le site du GISTI en ce qui concerne les droits et subventions auxquels peuvent prétendre ces personnes.

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