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Mais où est donc Fathy Karkar ?

Samedi 14/02/2009 | Posté par Isabelle Andrivet & Lideth Rodriguez (EJCM)

Expédition spéciale, notre binôme de choc féminin part à la recherche de celui dont on parle avec admiration dans son quartier, dont on vante le talent et le caractère imprévisible. Rencontre du troisième type avec l’artiste-peintre des Flamants : Fathy Karkar !

Gare Saint-Charles 14:05, sur le quai, nous attendons le TER. A quelques minutes de la station Picon-Busserine, Fathy s’impatiente de nous recevoir au local de l’association Media 2.  Il fait beau, le soleil est au rendez vous. Nous sommes en retard. Quand nous arrivons, il n’est déjà plus là. Fathy Karkar est un personnage énigmatique, celui qu’on ne voit nulle part mais qu’on cherche partout.  L’approcher, c’était presque trop beau.

15:15 : Retournement de situation. La porte s’ouvre, et dans un grand fracas, l’artiste fait son entrée. On croyait être venues chercher le yéti, mais c’est face au large sourire d’un être touchant que l’on se retrouve : grand, costaud, bonnet bleu, tout comme ses grands yeux derrière ses lunettes, il se fait une joie de répondre à nos questions. Karkar est d’humeur volubile. L’entretien peut commencer.

L’heure va s’écouler en un rien de temps, les thèmes défilent, et Fathy a envie d’échange, de faire connaître son art, de se faire reconnaître en tant que personne. C’est l’homme qui se présente à nous, avant que l’artiste ne prenne le dessus. Il a grandi à la cité des Flamants. Même si il n’y habite plus, il y revient tous les jours pour se retrouver, et voir sa maman. On l’interroge, il parle longuement, il se balance sur sa chaise, il sourit en revenant sur ses débuts. L’autodidacte a 36 ans aujourd’hui, cela fait bientôt 18 ans qu’il a découvert la peinture :

 

 C’est un personnage très ouvert, mais volontairement seul. «Je ne fais pas ça pour être riche, ou pour rouler en Ferrari. Je le  fais pour vivre, si je n’étais pas satisfait de ma peinture, je serais ailleurs, marié avec une famille. C’est un bonheur auquel je crois, me marier et avoir des gosses, mais ça passe en second plan». Sa priorité, créer :

 
Son histoire est intimement liée à son quartier, à ses bâtiments,  ainsi qu’à ses origines algériennes, et plus précisément chaoui, qu’il revendique : «Moi je suis peintre avant tout, mais là je parle de ma communauté, nous sommes musulmans avant tout, et l’on se sent affecté de tout ce qu’il se passe là-bas.»  L’Afrique du nord et noire bat en lui, l’inspire, lui évoque «une certaine chaleur, un truc assez oriental» que l’on retrouve dans ses œuvres, «J’ai beaucoup de choses africaines, c’est vrai, tu transmets forcément tes origines, y’a toujours quelque chose, un truc du fond qui sort».

Quand on lui parle de sa technique, de son inspiration, de son style, c’est comme un enfant qui répond, droit au but, candide, et presque inquiet de ne pas savoir bien définir ce qui se passe dans sa tête quand il crée : «Je sais pas, p’t’être que ça vient d’ailleurs». Il éclate de rire. Quand il laisse couler la peinture sur sa toile, il vide le tube «Je m’arrête que lorsque ça s’arrête dedans… Des fois, je ferme les yeux, je sais pas pourquoi, ça tombe sur ce que je veux…».
Ensuite,  c’est très ému qu’il parle de son «préféré», Pablo Picasso, référence des références pour lui, peintre multiple. «Je vais très souvent au musée Picasso, j’ai besoin de voir ses tableaux». Tout comme son modèle, il aime l’innocence et la pureté de l’enfance, et tend à rester un enfant pour toujours : «l’imagination de l’enfance, elle est divine»…

Il enlève son bonnet, il essuie quelques gouttes sur son front et s’excuse de ne pas être allé chez le coiffeur. Le ton est un peu plus grave, puisque nous abordons la réalité de la vie des quartiers, et l’éventualité de tendre lui-même une perche vers ces jeunes qui  n’ont plus de repères. L’animateur qu’il était, et le peintre qu’il est devenu se sentent investis d’une mission. Il se veut passeur de témoin : L’accès à la création artistique est une échappatoire. Lui-même avait reçu de Patrick sa première palette, ainsi que de précieux conseils et un réel soutien.

Et pour ceux et celles qui ne le savent pas, Fathy Karkar est coté à la Fondation Drouot ! Et alors ça fait quoi ? Cela crédibilise forcément, cela renforce une seule chose pour lui, c’est que cela révèle «un potentiel énorme, y’a beaucoup de choses, il faut exploiter tout ça, il faut que je bouge !» Il soulève cependant un réel handicap qui nuit à sa reconnaissance: «malheureusement  j’ai pas les moyens qu’il faut, j’ai pas les gens qu’il faut, j’ai des amis précieux, mais ce sont pas des gens de l’art…»


Karkar n’est pas du genre à se laisser abattre, et rebondit dans un dernier sourire : «alors je vais monter avec mon book, essayer de me vendre, à Paris,  peut-être même en Angleterre… Je crois beaucoup au destin». A Mécène-Entendeur, Salut !


Fathy Karkar
envoyé par redactionmarseilleblog

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