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Dans les yeux de Charly

Vendredi 10/09/2010 | Posté par Charly Carré

NOUVELLE CHRONIQUE sur le MBB, Charly, la plus nordiste des Marseillaises, nous fait partager son humeur, entre coups de gueule, coups de cœur et coups de blues.

La semaine dernière j’ai eu froid ! Je suis retournée dans le nord, en Picardie. Là où le froid est glacial et où y’a pas l’OM. Enfin presque ! « Arrête de te plaindre du froid, la Marseillaise » qu’y m’disent la haut. « Qu’est ce que tu tiens bien la bière, la nordiste » qu’y m’disent en bas.

Si je suis la « Marseillaise » dans le nord et la « Nordiste » dans le sud, croyez moi, j’ai un sérieux problème d’identité. Si vous ajoutez à ça mon vocabulaire qui oscille entre « cha vo dracher » (il va pleuvoir) et « o fan, t’y es un boucan », je suis parfois  à la limite de la schizophrénie. Agacée par les nombreux débats identitaires actuels (qui est français ?), je viens aujourd’hui, plaider en toute mauvaise foi, une cause oubliée : celle du Picard. Le Picard est un pauvre gars du Nord comme les autres, dont le seul tord est de ne pas être né dans le 5-9 (Sa poste, ses terrils…) ou dans le 6-2 (Son carnaval, son RC Lens, ses corons, son tuning et de tout ça méfiteu).

 Car le Picard fait la tronche, il souffre. En effet, malheur et comble de malchance, le Picard n’est pas un Ch’ti. Vaguement qualifié de « cousin » par un Dany Boon caricatural dans un film dont je préfère ne pas parler  et partageant son nom avec une marque de surgelé très célèbre, le Picard est en mal d’identité. Qui ne m’a jamais dit « Oh tu es picarde, t’es pas du nord alors !». Si la Picardie n’est pas au nord, faudra me dire où ça se trouve.

Le Picard doit bien être le seul citoyen français à vouloir le rapprochement territorial qui lui permettrait enfin de rejoindre le rang des très adoubés « habitants du Nord-Pas de Calais », ces fameux gens du Nord, ceux qui parlent un dialecte devenu charmant (sacrément sexy c’est sûr) et dont les problèmes socio-économiques font tout le charme, là où ils font de la Picardie, une contrée où dégun veut habiter, excepté quelques Parisiens en mal de maisons perdues dans une campagne bucolique. Ah ça oui, ils font les malins, les ch’tis (bien malgré eux certes). Mais le reste de la France oublie souvent que ce sont eux qui parlent une variante du Picard et pas le contraire. Non mais !

Ma réflexion sur l’identité nordiste a atteint son paroxysme lorsque j’ai croisé cette vitrine, en plein milieu d’Amiens. Amiens : une équipe de hockey sur glace (très bonne certes, mais qui s’intéresse au championnat de hockey dans ce pays ?), une équipe de foot en national (ah ça, le stade est grand) et une passion raisonnable pour les cousins lensois (encore eux). J’ai du manquer un épisode, mais c’est sûrement là, qu’intervient la fierté d’être Marseillais ! Si, si regardez-y de plus près : ce sont bien des goodies « fiers d’être Marseillais » ! Les mêmes que tout Marseille arbore fièrement quand il s’agit d’en découdre avec des Parisiens ou autre étranger venu du Nord d’Avignon.


À l’heure d’un régionalisme croissant, d’une « groupisation » massive et aliénante, la question est : faut-il toujours être fier d’appartenir à un groupe, un dialecte, une gastronomie ? A-t-on raté sa vie lorsqu’on est Marseillaise d’adoption, Picarde de souche et Belge de sang ?

Peuchère, je ne sais pas vous mais mi’z’aute, la pitchounette deuch’ nord, chu déjà bien en peine d’être moi, une fois !

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Charly Carré -