Entre rose et bleu marine
Lundi 18/06/2012 | Posté par Jan Cyril Salemi
A Marseille, et dans la région, un petit mistral rosé a soufflé sur les élections législatives. Mais la tendance bleu marine, si elle n’a pas l’ampleur d’une vague, a laissé son empreinte sur le scrutin.
Sans surprise, la gauche a obtenu la majorité absolue à l’Assemblée Nationale. La victoire est large, mais ce scrutin restera marqué également par le retour du Front National au parlement. Même si la formation d’extrême-droite n’aura que deux députés, les scores réalisés, notamment dans la région, démontrent à quel point le parti de Marine Le Pen pèse sur la vie politique française.
A Marseille, le FN était présent au second tour dans quatre circonscriptions sur sept, trois duels et une triangulaire. En centre-ville, le socialiste Patrick Mennucci a surmonté facilement l’obstacle, et atteint plus de 70% des suffrages face à Marie-Claude Aucouturier.
Dans les 9e et 10e arrondissements, Guy Tessier (UMP), qui règne en maître sur ce territoire, n’a pas connu non plus de difficultés pour se faire réélire.
En revanche, dans les quartiers du nord de la ville, il s’en est fallu d’un rien pour que le FN ne crée la surprise. Pas dans la 7e circonscription (14e, 15e et 16e arrondissements), même si Bernard Marandat frôle les 40% face au socialiste Henri Jibrayel.
Mais dans la 3e circonscription (12e, 13e et 14e arrondissements), la décision s’est faite dans un mouchoir de poche. La députée sortante, Sylvie Andrieux, emmêlée dans des affaires judiciaires, n’avait plus l’investiture du Parti Socialiste. Elle devance finalement son adversaire FN, Stéphane Ravier, de moins de 700 voix.
Dans ces quartiers, le clivage entre zone résidentielles et cités populaires est flagrant. L’une des caractéristiques des quartiers Nord de Marseille est justement que les petites résidences et les villas côtoient les grands ensembles et les barres HLM.
Les urnes révèlent les limites de cette cohabitation. Elles confirment aussi que le métissage n’est qu’apparent dans ces quartiers, et que les territoires sont en réalité profondément marqués, même s’ils ne sont distants que de quelques centaines de mètres. L'analyse des résultats détaillés, bureau par bureau, ne laisse guère de doute à ce sujet.
Ailleurs dans les Bouches-du-Rhône, c’est notamment à Arles que le FN a joué les trouble-fêtes. Le candidat UMP, Roland Chassain, s’était ouvertement désisté en faveur de la représentante FN, Valérie Laupies. Le député PS sortant, Michel Vauzelle, ne l’emporte finalement qu’avec moins de 1400 voix d’avance.
Quant aux deux députés FN élus, l’aura médiatique qui les entourait a certainement contribué à leur victoire. A Carpentras, la petite-fille de Jean-Marie Le Pen, étudiante d’à peine 22 ans, devient la plus jeune députée de l’histoire de la Ve République. Marion Maréchal-Le Pen suit ainsi la lignée familiale, puisque son grand-père, élu en 1956, à l'âge de 27 ans, fut le benjamin de l'Assemblée sous la IVe République.
Enfin, Gilbert Collard est devenu hier député du Gard. Le parcours de ce célèbre avocat marseillais mérite qu’on s’y attarde un peu. Longtemps membre du PS, Gilbert Collard a peu à peu glissé vers la droite puis l’extrême-droite.
En 1998, Gilbert Collard était pourtant l’avocat des amis d’Ibrahim Ali, un jeune homme tué trois ans plus tôt dans les rues de Marseille, par des colleurs d’affiches du FN. A l’époque, il n’hésitait pas à dénoncer “le délire raciste des militants du Front National.”
Des militants qui, aujourd’hui, lui ont donné mandat pour les représenter à l’Assemblée. Chacun s’arrange avec sa conscience comme il peut...
Crédit photo : Jan Cyril Salemi
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Par Tony Off