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“J'ai vraiment ressenti qu'on n’était plus libre”

Vendredi 16/12/2011 | Posté par Florent Djahine

Ce week-end, à deux reprises, les Indignés de Marseille ont été confrontés à des interventions policières violentes. Florent était parmi les manifestants, il nous livre ici son témoignage.

Le déploiement de force de ce week-end nous a tous surpris. Aussi bien nous, Indignés, que les passants, qui, s’ils ne l’étaient pas avant, le sont devenus après avoir vu le dispositif policier mis en place, et leur façon de faire. Les Indignés de la Défense disent même qu’à Paris la répression était moins violente. La plupart des passants nous ont demandé pourquoi les policiers étaient si nombreux.

Il est clair que c’était disproportionné en comparaison du nombre d'Indignés et de nos intentions. Tant de fourgons de CRS pour quelques manifestants qui se sont rassemblés dans la joie, la bonne humeur, et le pacifisme qui, je précise, a été respecté tout au long de la soirée.

Les policiers parlent de jet de canette. Personnellement, je n'ai rien vu. Il y avait juste un jeune cagoulé qui ne faisait pas partie du groupe et qui avait des bouteilles en verre dans les mains, que nous avons calmé.

La répression de samedi soir était violente. Que ce soit dans l'attitude, avec des petites réflexions du genre "arrête les conneries, petit militant à la con" ou bien "dégagez, vous serez mieux devant votre télé", comme dans les actes : coups de matraque, de bouclier, gaz lacrymogène.

Des personnes ont été poussées dans les bassins, des jeunes et des personnes âgées. A un moment, je n'ai pas compris pourquoi la chef s'est permise d'arracher le sac en plastique d'un des Indignés, comme si nous étions en possession d'objets dangereux. Pourtant, je le répète, nous avons respecté cette valeur qui nous est chère : le pacifisme.

Mais l'action policière la plus menaçante est sûrement celle qui s'est déroulée dans la nuit, après notre évacuation de la fontaine du cours Julien. Nous étions alors beaucoup moins nombreux. Quelques personnes se sont installées sur des bouts de carton.
Des CRS arrivent, mais pas seulement. Ils sont aussi accompagnés de la BAC. Je crois que là, nous avons vraiment tous eu peur. Il le disaient eux-mêmes : ''nous on n’est pas les CRS, on rigole pas''. Ils nous bousculent violemment, alors nous choisissons de ne pas nous attarder, je rentre chez moi.

Le lendemain je retourne au cours Julien, pour voir ce qu'il restait du rassemblement d'hier. Les CRS sont encore là. Je passe. Mais c'est uniquement car je suis seul et que je n'ai pas trop une tête de marginal. Peut-on parler de délit de faciès ? Je ne sais pas, mais ça y ressemblait.

Je passe donc. Je reconnais au loin quelques Indignés de la veille. Je me joins à eux alors qu'ils décident de faire une partie de carte, toujours sous la surveillance très rapprochée des CRS. Nous ne sommes même pas une dizaine, mais tout de suite un CRS vient nous voir et nous avertit à plusieurs reprises que si une personne de plus se joint à nous, ils nous feraient dégager.

Ainsi, à chaque fois qu'une dizaine de personne se rassemble sur l'espace publique, il faudrait le justifier ? Non, évidemment. J'ai vraiment ressenti qu'on n’était plus libre. À quelle condition précise, un rassemblement d'individus doit-il nécessiter une autorisation ? A quel moment avons-nous menacé l'ordre public ?

Le dernier épisode de ce week-end était celui des interpellations. J'avoue que j'ai encore du mal à comprendre. Pourquoi avoir interpellé les huit indignés le lendemain du rassemblement, alors que c'était ce soir-là que nous opposions une résistance ?

Pourquoi interpeller huit personnes alors que nous étions peu nombreux, et que nous avions décidé de partir à l'arrivée des CRS ? Comment se fait-il que l'on procède à des arrestations, sans même prononcer les motifs de ces arrestations ? J'ai vraiment eu le sentiment d'une police qui arrête arbitrairement.

Les passants n’ont pas compris. Un père accompagné de ses deux enfant, s'adressait au CRS en leur demandant s’ils n'avaient “pas honte d'agir ainsi devant des enfants”. Une femme qui s'occupait d'un stand de tir m’a livré son incompréhension, "vous n'aviez rien fait, vous n’embêtiez personne, vous étiez juste en train de discuter''.

Ce que je retiens de ce week-end, c'est une police à la limite de la légalité. Et un gros sentiment que parfois, la loi n'est finalement pas faite pour protéger les citoyens, mais juste pour rendre légale toute action de force contre des mouvements qui pourraient sérieusement menacer le système mis en place.



Samedi 17 décembre, à partir de 9h30, les Indignés de Marseille organisent une marche de protestation contre la répression policière, qui ira du Vieux-Port jusqu'à la Préfecture. 


Crédit photo : MatHelium

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Florent Djahine -