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Sénégal, nanga def ? (Comment ça va ?)

Mardi 07/02/2012 | Posté par Madou et Pascaline

Dans moins de trois semaines, le Sénégal élira son président. Depuis que la candidature d’Abdoulaye Wade, actuellement au pouvoir, a été validée, le pays connaît une situation de plus en plus agitée. Pascaline a contacté Madou, qui vit à Dakar, pour lui demander comment va son pays.

Nanga def ? Comment ça va ? Voici la question que l’on se pose lorsque l’on entend les nouvelles du Sénégal ces derniers jours. Mais quelles nouvelles ? Nouvelles d’ici ou de là-bas ? Les informations qui nous parviennent reflètent-elle la réalité de la situation vécue par les Sénégalais ? Pour le savoir, nous sommes allées nous informer auprès de Madou, notre reporter du jour et membre du Parti Socialiste à Dakar.

Alors que la presse internationale se passionnait pour la candidature du chanteur mondialement connu, j’ai nommé le grand Youssou N’Dour, les Sénégalais se moquaient gentiment de lui. Ils se disaient que leur actuel président Abdoulaye Wade avait vraiment fait n’importe quoi pour que les chanteurs veuillent se présenter aux élections présidentielles !

Mais actuellement, l’heure n’est pas vraiment à la rigolade. Car depuis, la candidature de la star a été invalidée ; et surtout, celle d’Abdoulaye Wade, l’actuel président, a été validée. Il s’apprête donc à briguer son troisième mandat, alors que la constitution n’en autorise que deux.

Enfin, devrais-je dire l’ancienne constitution, car elle a été modifiée par Wade à son arrivée au pouvoir en 2000, ce qui lui permettrait de se représenter sous l’égide de cette nouvelle constitution (le premier mandat ne comptant pas). C’est sur cet argument que s’est basée la décision rendue ce vendredi 27 janvier par les cinq "sages" du conseil constitutionnel, cinq personnes nommées par le président en question…

Voilà pourquoi on peut demander au Sénégal comment il va, moins d’un mois avant les élections présidentielles dans le pays.

Mais reprenons le fil de l’histoire, en passe de devenir lHistoire avec un grand "H"… Le 23 juin 2011, un projet de réforme constitutionnelle prévoit l’élection du président de la république au suffrage universel direct, ce qui aurait notamment pour conséquence de permettre une élection au premier tour et ce, même avec 25% des votes.

Ce texte n’est pas passé à cause de la pression de la rue : le mouvement "Y’en a marre" né à l’initiative de rappeurs sénégalais quelques mois plus tôt, et rejoints par d’autres manifestants depuis, fait entendre son ras-le-bol général lors de cette journée et la foule fait reculer les députés.

Depuis, le Mouvement du 23 juin est né (M23), réunissant tous les opposants à la candidature de Wade le 26 février prochain, sous la coordination d’Alioune Tine, le secrétaire général de la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme. Le M23 s’est réuni les 23 de chaque mois, depuis cette date du 23 juin dernier.

Mais depuis vendredi, et la décision du conseil constitutionnel, il se réunit tous les jours… Et depuis vendredi "ça chauffe", comme nous l’explique Madou.

Les manifestants demandent le retrait de la candidature de Wade, et ils prévoient de durcir le ton. Les routes sont barrées avec des pneus enflammés, des camions de sable sont déversés et les cours à l’université sont actuellement perturbés à cause des risques d’émeutes.

"Ce qui nous choque, explique Madou, c’est qu’un étudiant en master à l’UCAD (Université Cheikh Anta Diop de Dakar) est décédé, renversé par une voiture de police, il y a déjà eu cinq morts".
Un policier a également été tué dans les manifestations. Alioune Tine, le coordinateur du M23, a d’ailleurs été arrêté suite à ce meurtre. Emprisonné pendant deux jours, il a été relâché le 31 janvier, faute de charges retenues contre lui. Le risque est grand de voir une escalade de la violence entre forces de l’ordre et manifestants.

Depuis le 5 février, la campagne présidentielle a débuté, et la situation ne s’est pas améliorée. Le M23 (voir ici sa page Facebook) a des revendications pacifistes, mais il peut y avoir des infiltrations de personnes violentes dans le mouvement. Certains disent même que le président à embauché des mercenaires pour "casser" les manifestations.

Alors les gens ont peur et le souhait exprimé au début du mouvement de voir la place de l’Obélisque, lieu des rassemblements, se transformer en place Tahrir, est en passe de s’effondrer.

Pourtant, lorsque je demande à Madou les raisons de son pessimisme, sur le mouvement, sur le départ de Wade et sur l’avenir du Sénégal, moi qui de mon regard naïf et lointain voyait déjà une "révolution sénégalaise" renverser le pouvoir en place et la corruption, je ne peux que constater la complexité de la situation : entre le danger encouru par les manifestants et les risques de fraude électorale si Abdoulaye Wade se représente, les défis à relever sont nombreux.

Mais même s’il gagne, les manifestants ne le laisseront pas faire, "j’irai moi-même manifester" me dit Madou, qui fera partie des observateurs pendant les élections, "et s’il y a des fraudes le 26 février, nous dresserons des procès verbaux pour en informer le parti".
Je lui suggère toutefois la deuxième option, parce que c’est plus prudent…, reck !*


*..., reck ! = ..., quoi !



Crédit photo : Pascaline




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