Du rouge aux joues
Lundi 16/04/2012 | Posté par Christine Gorce
C’était l’événement du week-end à Marseille : le meeting de Jean-Luc Mélenchon sur les plages du Prado. Deux bloggeuses du MBB y étaient, voici ce qu’elles en ont rapporté. Ici la version de Christine.
Marseille, 14 avril. Après Paris-Bastille et Toulouse-Capitole, c’est le troisième meeting en plein air pour le Front de Gauche et son candidat, Jean-Luc Mélenchon. 100 à 120 000 personnes se sont rassemblées sur les pelouses du Prado. Qui sont-elles ? D'où nous (re)vient cette gauche qu'on croyait disparue ?
Malgré l’interdiction du défilé initial, l’avenue du Prado est noire de monde. Ou disons rouge, plutôt. On sent que la mairie s’est mise en quatre pour acheminer les militants : arrêt technique au métro Castellane, suspension du trafic jusqu’au David, pas de plan de circulation : une plage, ça se mérite...
Devant sa boutique, un concessionnaire prend en photo les étendards PCF descendus des cars. Ça faisait bien longtemps qu’on n’avait vu autant de communistes en ville.
C'est la grande nouvelle de cette journée ventée qui fait danser comme des coquelicots les sigles du Parti Communiste Français, du Parti de Gauche et de la CGT. Ils sont venus de Nice, de Gap ou d'Arles, de tout le grand Sud-Est. Quoi qu’on pense de son style et de son parcours, Mélenchon a réussi cet exploit de redonner vie et force à des composantes de gauche qu'on pensait éteintes.
“Le baiser de la Méditerranée”
Sur la plage, Mélenchon entame son long discours par une déclaration d'amour : “C'est ici qu'il y a 2600 ans, une femme a fait le choix de prendre pour époux l'immigré qui descendait d'un bateau. C'était un Grec, et de ce couple est née Marseille.”
En saluant la France métissée face à cette France inquiète, toujours susceptible de s'en remettre au vote FN, Mélenchon a l'habileté de raviver un sentiment de fierté portuaire ancestrale qui balaie d'une revers de main le réflexe xénophobe. Le patriotisme n'est pas en reste, la laïcité est rappelée avec fermeté, “l'humain d'abord” comme on le lit sur les autocollants.
La rhétorique ouvriériste est forte. Mais même si l’on croise des dockers de la CGT, ou les Fralib de Gémenos, ce peuple rassemblé autour du Front de Gauche, n’est pas vraiment issu de la classe ouvrière. Plutôt de ces classes moyennes en voie de prolétarisation.
Le discours, qui entend déclarer les ouvriers “classe d'intérêt général” et réaffirmer “la citoyenneté des travailleurs dans l'entreprise”, réveille chez des employés, des fonctionnaires, une adhésion émue. Avec parfois des couacs : “Il faut libérer le travail, amorce l'orateur, parce que le travail...” (respiration), “… c'est pas la santé...”, coupe une dame dans mon dos.
Il se peut aussi que le Front de Gauche ait rassemblé en ce lieu plus que ses futurs électeurs.
Lionel a 32 ans, il ne votera pas. Il est seulement venu pour savoir à quoi ressemblait un meeting. Il a écouté le discours et ne croit pas qu'un homme venu du système pourrait changer ce système qu'il critique.
Générations politiques
D'autres, plus jeunes, font ici leur première rencontre avec la politique. Elles et ils ont une vingtaine d'années, sont en fac de sport, en bac pro ou déjà dans la vie active et se revendiquent de la classe moyenne, tradition de gauche.
C'est la première fois qu'ils ressentent un intérêt pour des élections, mêlé d'une inquiétude réelle pour l'avenir. On parle pouvoir de l'argent et consommation, je les provoque en lançant : “si ça se trouve vous avez des i-phones dans vos poches...” Les portables sont aussitôt brandis sous mon nez : “le mien il est pourri”, ”je ne l'ai même pas payé...” La VIème République a ses chances...
Alexandra et Manon, deux jumelles de 18 ans, ont accompagné leurs parents et entraîné avec elles Malik, un jeune de leur âge qui dit ne jamais s'être intéressé à la politique.
Elles vont voter pour la première fois, et c'est comme une première respiration. “Avant Mélenchon, personne ne se souciait vraiment des classes moyennes. Le PS c'est la gauche molle, nous ce qu'on veut c'est une vraie gauche”.
Ont-elles pour autant foi dans le programme du candidat ? “Cinq ans, c'est peu, disent-elles. La France est dans un tel état qu'il faudra du temps. Mais on y croit !” Malik est resté silencieux sous son drapeau éclatant, les mots lui manquent pour dire ce qu'il découvre. “Je ne sais pas... C'est la première fois. C'est impressionnant.”
En souvenir de l’arrière-pépé
À quelques pas de là se tient un encore plus jeune militant recouvert d'un cœur rouge. Thomas, 10 ans et demi, a déjà calculé qu'il lui faudra attendre deux mandats avant d'élire un président. Lui aussi est issu de la classe moyenne, d'un milieu de profs et de petits fonctionnaires lié au PC depuis quatre générations, depuis “mon arrière-pépé”...
Ses premières manifs il les a vécues dans le porte-bébé et la poussette. Lorsqu'on lui demande quels sont ses héros dans la vie il répond sans hésiter : “mes arrière-grands-parents. Ils étaient résistants dans le Gard.”
En évoquant les mobilisations de 2005 sur les retraites, je lui demande ce qu'il en a compris, en quoi la politique touchait sa vie d'enfant : “ben, dit-il, c'est comme si mon pépé travaillait encore.”
Du programme du FDG et du discours qu'il a suivi en entier, il comprend que “certains ne pensent qu'à l'argent ou au pouvoir” alors que lui, Mélenchon, ou plutôt son parti, veut “partager les richesses”. Et le petit garçon d'ajouter que c'est lui qui a décidé sa maman à venir. Qui elle, pourtant, ne votera pas pour le Front de Gauche.
Crédit photos : Christine Gorce
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Réactions des internautes
Mardi 17 Avril 2012, 09:33
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Il y a malheureusement en France un a priori plutôt positif envers les communistes, qui ont pourtant toujours porté aux nues les régimes soviétiques - MG Buffet le confessait en novembre 2009 à l'occasion du 20ème anniversaire de la Chute du Mur de Berlin - juste parce qu'ils ont réussi à faire croire qu'ils sont des résistants de la 1ère heure, des anticolonialistes fervents et des défenseurs de la veuve et de l'orphelin.
Or :
- le PCF était inféodé à l'URSS, qui avait conclu un pacte avec l'Allemagne; du reste, lorsque l'Allemagne a envahi la Pologne puis lorsque ce pays a été partagé entre Allemagne et URSS, où étaient les communistes qui s'étaient engagés dans les Brigades internationales pour défendre les républicains espagnols contre Franco ?
- le PCF a, semble-t-il, reçu de grasses subventions de l'URSS pour financer sa campagne de 1981 - époque à laquelle Marchais, Hue etc s'en prenaient à l'immigration massive et faisaient le lien immigration-trafic de drogue
- comment le PCF et l'URSS ont-il pu faire croire à un combat anticolonialiste, lorsqu'on sait que l'URSS était un véritable empire fondé sur des colonies, les fameuses « républiques », converties de force au communisme avec tout ce qui s'ensuit
En outre, Mélenchon est un socialiste qui, en 1992, justifiait le Traité de Maastricht qui a plongé l'UE d'aujourd'hui dans cet ultra-libéralisme qu'il fustige aujourd'hui.
Par ailleurs, facile, à Marseille, de clamer que le métissage, c'est formidâââble, que le Maghreb, c'est l'avenir de la France et autres niaiseries - pour Eva Joly, c'est l'Afrique (noire) qui est l'avenir de la France et de l'Europe.
Et si l'avenir de la France, c'était... les Français eux-mêmes ?...
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Mardi 17 Avril 2012, 18:41
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Re: Ceci n'est pas une hagiographie
Pour une fois je suis assez d'accord avec vous (!), sauf sur le parallélisme indéfendable entre le FN et le FdG...On peut avoir des doutes sur le candidat, et se pencher avec intérêt sur le phénomène qu'il suscite.
Je pourrais en rajouter sur ses tendances péremptoires, centralistes ou nationalistes ; je pense que son discours sur le métissage est surtout un outil stratégique contre le FN.
Maintenant, le Front de Gauche est une force plurielle, traversée par des composantes hétérogènes, où l'on retrouve autant de vieux apparatchiks que de néo-démocrates, difficile de savoir où se situe le candidat dans cette synthèse...
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Mercredi 18 Avril 2012, 07:56
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Re:
Mélenchon fait partie du système, d'ailleurs il refuse que les candidats rendent publique leur fortune. Il balaie pour le PS.Répondre -
Mercredi 18 Avril 2012, 08:00
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Re:
Sans parler d'un de ses bras droits, pourtant fort bien rémunéré, qui bénéficie d'un HLM tout en se plaignant, à l'instar d'autres personnalités d'autres partis, d'un manque de logements sociaux !Répondre -
Jeudi 19 Avril 2012, 06:53
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Re:
Concernant le métissage et la société multiculturelle qui selon certain(e)s serait souhaitable et possible mais sans jamais nous dire comment, je conseille la lecture du chapitre 9 sur le Nord du livre "Voyages en France" D'Eric Dupin.Répondre -
Jeudi 19 Avril 2012, 12:12
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Re:
Un autre pour la route :"Nous assistons à une montée en puissance de la mise en avant d’une identité religieuse. Chaque jour amène son lot de revendications nouvelles, que ce soit dans le monde universitaire, dans les entreprises, à l’hôpital, dans les lycées. Au lycée, il y a le phénomène de l’abaya (robe qui couvre l’intégralité du corps) qui se propage. Il nous a été signalé le cas d’ingénieurs qui ne souhaitaient pas être dirigés par une femme ; d’étudiants en classe préparatoire aux grandes écoles qui refusaient de passer un oral avec un professeur femme ou encore d’étudier d’autres philosophes qu’Averroès ; d’étudiantes à l’université, voilées et gantées, qui se regroupaient systématiquement au premier rang de l’amphi et interrompaient régulièrement les cours de sociologie pour ramener tous les débats aux méfaits de la colonisation ; de salariés qui imposent à leur employeur leurs prières quotidiennes."
http://www.malikasorel.fr/archive/2012/04/19/entretien-dans-valeurs-actuelles.html
Les commentaires sont également dignes d'intérêt.
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Jeudi 19 Avril 2012, 14:12
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Re:
Tes conseils de lecture on s'en passera, aujourd'hui c'est Mélenchon pas Marine LePen !Répondre -
Jeudi 19 Avril 2012, 14:45
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Re:
Pardon ?Répondre -