Un million de Mars'iens : Raymond
Vendredi 26/11/2010 | Posté par Samir Akacha
Marseille : 850 000 habitants et un peu plus. Dans cette chronique, Samir nous emmène à la rencontre de l'un d'eux, croisé au hasard de ses déambulations et de ses rencontres fortuites. Cette semaine : Raymond
Tout près du cours Julien, en face des grilles du Palais des Arts, des rangées de livres tentent de retenir l'attention des passants. Derrière les étalages, Raymond, bouquiniste depuis 45 ans. 45 ans au même endroit, à 10 mètres près. Il a vu le quartier se transformer : « Avant, il y avait énormément de restaurants sur le cours Julien qui marchaient. Mais l'activité s'est dégradée, c'est un quartier qui se paupérise ».
Raymond a toujours vécu à Marseille. Mais depuis quelques temps, il aime beaucoup moins la ville. Il a vu les « marseillais de souche » partir. Pas qu'il regarde d'un mauvais œil le multiculturel, il regrette seulement le manque de respect qu'il observe chez certains : « Depuis la crise, les gens s'en prennent plus facilement à leurs voisins qu'à ce qui nous a plongé dans une telle catastrophe ». Aux abords de son étalage, Raymond voit plus de tentatives de vol, de la part de personnes qu'on ne s'attend pas à voir prendre un livre et le glisser sous le manteau.
On imagine une clientèle assidue, le lycée Thiers à proximité, avec un grand choix de bandes dessinées anciennes et modernes, des livres et des DVD. Mais le constat n'est pas encourageant : « Les jeunes lisent très peu par rapport à il y a quelques années, même s'ils constituent une bonne partie de ma clientèle. Il y a aussi le téléchargement qui joue. Pourtant, un livre est toujours utile, on peut s'en imprégner. Sur internet, les images défilent, on ne peut pas mémoriser » Ce n'est pas pour autant qu'il refuse de se rendre sur la toile : « Il faut les deux, on ne peut pas faire marche arrière, il faut aller vers le futur ».
S'il a un souhait, c'est de voir les marseillais se tourner un peu plus vers la culture, ne pas être juste focalisés sur le sport et le foot. Il a vu de nombreux bouquinistes fermer depuis ses débuts. « La vie est difficile, on fait des choix, lire ou se nourrir. S'il n'y avait pas de souci d'argent, il y aurait plus de culture. Depuis la crise, les gens vendent leurs livres, ils ont très peu de bouquins chez eux. On trouve surtout des bandes dessinées dans les bibliothèques ». Quand à savoir si Marseille 2013 va changer quelque chose, Raymond reste dubitatif : « ça n'évoluera pas vers le culturel, quand on a pris de mauvaises habitudes, c'est impossible à enlever ».
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