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Inscrire son fils en maternelle : une matinée d’enfer

Jeudi 28/05/2009 | Posté par Malika Hadbi-Boufercha

Maman de deux jeunes enfants, Malika a voulu inscrire son plus jeune fils à l’école maternelle, la plus proche de chez elle. Simple comme bonjour ? A Marseille, pas tout à fait.

7h00 : le réveil sonne, ce matin est une journée d'exception, j'inscris mon fils à l'école maternelle. Douchée et changée, j'avale vite fait un café noir. Dernière vérification d'usage sur l'attirail de documents administratifs indispensables : «livret de famille, carnet de santé, justificatifs de domicile, pièce d'identité», tout est dans mon sac.

7h30 : Au 2 de la rue Maurice Korsec petite ruelle marseillaise nichée derrière deux autres ruelles, une petite foule m'indique que je suis bien devant le bureau des inscriptions. Il n'ouvre ses portes que dans une heure et déjà une trentaine de personnes est accoudée au mur d'enceinte de la Direction de l'Education de la Ville. Elles discutent entre elles. Je m'installe dans la file d'attente discrètement. A peine ai-je le temps de me retourner que trois autres personnes ont pris place derrière moi, et les arrivées vont durer jusqu'à 8h30.

8h30 : le bureau va ouvrir ses portes, une dame, coupe au carré et robe impeccable, se glisse dans la file pour nous préciser que les inscriptions pour le 2ème arrondissement se font au 15 bd des Dames. Elle espère ainsi désengorger cette file, mais que nenni. Personne ne bouge : tout le monde est bien là pour inscrire son enfant dans le 1er ou le 3ème arrondissement. La porte laisse entendre un bruit de clef. Et, d’un coup, la file s’organise instinctivement, bien droite, les uns derrière les autres, en ordre de bataille.

Dès l'entrée dans le grand hall, les choses se compliquent... A Marseille où le football est érigé en religion, certains adeptes tentent des feintes. C'est ainsi que par je ne sais quel jeu de jambes, deux personnes essaient de gagner une ou deux places, d'autres s'essaient au petit pont… Passement de jambe pour cette autre dame… Mais le jeu est loin d'être apprécié comme il se doit par nos Marseillais. Il agace même et des cris se font entendre à la tête de la file.

Des insultes fusent de part et d'autre, puis les menaces suivent, pendant que l'une hurle: «Je suis la fille d'un mafieux corse, moi !»; l'autre se vante: «Et moi de la mafia marseillaise…»

Contente d'apprendre que mon fils aura pour camarades de classe les dignes héritiers de la pègre marseillaise, à défaut d'un petit fils de Raimu ou de Fernandel… On fera avec… Un agent de sécurité daigne enfin montrer le bout de son nez. L'inscription dans une école devient presque un acte de bravoure.

9h30: le calme est revenu sous une chaleur étouffante. J'arrive devant le guichet, arbore mon plus grand sourire : je suis fière de sortir tous mes documents. La guichetière y jette un œil rapide, ignore mon sourire et me donne un ticket, 665 bleu. Les tickets bleus c'est pour le 1er arrondissement et c'est au rez-de-chaussée que ça se passe.

Je m’apprête à descendre quand la dame à la coupe au carré m'arrête : trop de monde en bas, il faut attendre avec les autres. Elle m'appellera quand la salle d'attente du rez-de-chaussée se videra un peu. Les distributeurs de boissons sont pris d'assaut : café, chocolat et autres friandises font le bonheur de cette foule agglutinée dans un désordre assez impressionnant.

10 heures : la dame me fait un signe de la tête je peux descendre au RDC, quand j'arrive je vois une salle d'attente pleine à craquer, le numéro inscrit sur le panneau lumineux est le 652, je prends place et commence à discuter avec les dames présentes : elles sont venues faire la queue ce matin dès 6h30, certaines avec leurs petits.

11 heures :
mon numéro s'affiche enfin sur le panneau lumineux... Une dame blonde, la cinquantaine, m'accueille dans un bureau immense, prend mes documents, et enregistre mon fils. Elle me demande mon adresse pour savoir de quelle école mon fils dépend. Un leurre quand on sait que j'arrive à la dernière vague d'inscription. Elle paraît inquiète en consultant son ordinateur, et pour cause. Elle me demande : «Vous travaillez ?» je réponds oui.
Et votre mari ?»
Aussi».

Deux actifs? Rare!
Son visage s'assombrit, la rareté marseillaise....un couple qui travaille tous les deux. Elle fait mine de regarder un plan de la ville. Cela semble l'embêter d'avoir trouvé des places pour des non-actifs et de devoir me dire que mon fils ne sera pas là où je souhaiterais qu'il soit.

Elle commence sa recherche sur son ordinateur, Ecole de la rue Consolat complète, Longchamp, complète, Saint Vincent de Paul complète, Parmentier complète, Saint-Charles 2 complète... Il ne reste qu'une école, elle vérifie, il reste une place c'est l'école maternelle Colbert. Je comprends déjà mieux la bousculade de tout à l'heure : premier arrivé, premier servi, les critères ne sont ni économiques, ni géographiques, faut juste avoir un bon réveil et une endurance à l'attente en position debout.

École maternelle Colbert, ai-je vraiment le choix ? Elle est à une demi-heure de chez moi. Ma fille est aux Abeilles, normalement les enfants d'une même fratrie devraient être regroupés pour éviter aux parents qui travaillent ce genre de problème. J'ai eu le malheur de déménager l'année dernière alors mes enfants ne seront pas ensemble. Je devrais faire le grand écart pour les récupérer le soir, mais qu'importe n'ai-je pas enfin le sésame pour inscrire mon fils à l'école maternelle?

11h30: je sors ni soulagée, ni heureuse mais avec mon papier à la main. Déjà, dans ma tête, l'épisode d'aujourd'hui se conjugue au passé. Le futur, c'est la prochaine course-poursuite pour trouver une nounou qui récupèrera mon fils à la sortie de l'école à la rentrée. Qui a dit qu'être maman dans la deuxième ville de France était de tout repos ?

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Malika Hadbi-Boufercha -


Réactions des internautes

Tom
Jeudi 28 Mai 2009, 10:30
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Félicitation pour l'illustration. Elle me fait beaucoup rire.

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