La non-fête de la musique
Mercredi 24/06/2009 | Posté par Charlotte Penchenier
Grand succès pour la fête de la musique. Dimanche 21 juin au soir, le centre-ville grouillait de monde. Familles, petits et grands, toutes origines confondues, les Marseillais sont sortis en masse se dégourdir les jambes sur le Vieux Port et le long de la Canebière. A part ça, ils pouvaient aussi boire des coups. Pour le plaisir des oreilles, en revanche, on repassera.
Où étaient les musiciens hier soir? Mystère... La fête de la musique à Marseille, c'est le paradis des sound systems. Un kebab et trois cafés qui sortent un ampli, deux enceintes, et éventuellement, luxe suprême, un DJ. Il a bien fallu s'en contenter. Pour écouter de vrais gens avec de vrais instruments, il n'y avait que la fête du Panier et quelques concerts organisés : le festival Massilia Rock à l'Escale Borély, un concert philarmonique à côté de la mairie... Il paraît qu'il y avait du tango à l'Opéra, comme chaque année. Attention, la culture à Marseille, point trop n'en faut. Capitale européenne du no man's land culturel, 2013, nous voilà!
Nous sommes sortis vers 21h30 en quête d'ambiance festive et musicale. Quelle déception! Du côté des cinq avenues, un bar a installé une scène devant chez lui, avec un petit groupe sans prétention. Le long du boulevard Longchamp, rien. Aux Réformés, rien. Sur le haut de la Canebière, deux bars voisins rivalisent de décibels orientaux pour abreuver un public exclusivement maghrébin. Bonne ambiance et trottoirs pleins, mais toujours pas de musiciens. Bon, il paraît qu'un vrai concert a eu lieu un peu plus tôt. On est peut-être sorti trop tard, finalement. Rien de plus sur le bas de la Canebière. Ah si, une ambiance discothèque en plein air devant un marchand de glace. Vraiment passionnant.
Une famille en goguette nous demande des nouvelles de là d'où l'on vient. Nous leur faisons notre rapport, ils nous racontent la même déception pour la partie Vieux-Port / cours d'Estienne d'Orves. « Cela fait 3 ans que je tente... A chaque fois, je me dis que je ne reviendrai pas. Il ne se passe jamais rien », nous explique la jeune maman. « Pourtant, à Martigues ou dans les villes alentour, quand j'y allais, il y avait plein de petits groupes un peu partout. Comment ça se fait? » Nous nous posons la même question. Une ville comme Marseille fourmille de petites formations qui ne demandent qu'à se produire. Alors où sont-ils? Les autorisations sont-elles trop compliquées à obtenir? Ou pas délivrées? Est-ce un problème de matériel, d'électricité à trouver, de bar auquel s'adosser? Des commerçants trop frileux ou une municipalité résistante? Un manque de financements? La crise?
Bref, nous errons, énervés parmi les déçus, pour finalement atterrir au Panier. Les sound systems qui crachent du son y sont aussi, mais les musiciens et chanteurs en chair et en os y ont encore droit de cité. Plusieurs scènes, quelques fanfares ambulantes, et beaucoup, beaucoup de monde. Si la fête du Panier a fini par se caler sur les dates de la Fête de la musique, ce n'est pourtant pas de là qu'elle tire son identité, mais bien de ce quartier, de ses assos motivées, de tous ces stands qui viennent l'égayer, dans un joyeux chaos organisé, de son ambiance métissée. Bref, on peut encore s'y faire plaisir sans avoir l'impression de se faire avoir.
Je pensais que la fête de la musique était l'occasion de sortir de chez soi pour assister à des concerts – généralement gratuits – sur la place publique, dans un esprit de réappropriation de l'espace collectif. Amateurs ou professionnels, il en faut pour tous les goûts. Des rencontres improbables, et pas toujours que des valeurs sûres. Des groupes de rock lycéens ou autres petits jeunes qui font parfois leur première scène. Qu'importe, l'essentiel est de flâner, de passer de groupe en scène, de s'arrêter parfois, d'improviser un parcours urbain et musical en quête de bonnes surprises. J'y croyais, Marseille m'a déçue. Si l'on y ajoute le tramway qui s'arrête à 0h30, comme d'habitude, et les stations de vélo qui ferment à minuit, la boucle est bouclée. Marseillais, restez chez vous, y a rien à voir.
Si je me suis trompée, que des quartiers ont vu des micros fleurir partout sur leurs trottoirs, si vous avez trouvé votre bonheur hier soir, si vous avez réussi à entendre autre chose que du son en boîte qualité MP3, n'hésitez pas à rectifier, je serais ravie d'être contredite. Les commentaires, c'est juste en dessous.
Photo:Dora Kolokotroni. Fanfare au Panier, la fête du Panier tient le lieu de fête de la musique pour toute la ville.
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Par Tony Off