Voter, un droit pour tous ?
Lundi 19/03/2012 | Posté par Charlotte Lazarewicz
Lundi dernier, avait lieu un débat sur le droit de vote des étrangers. Promis depuis longtemps par la gauche, agité comme une menace par la droite, le sujet soulève bien souvent la polémique. Charlotte assistait à la soirée.
C’est une UFM (Union des Familles Musulmanes) bondée qu’auront pu trouver les curieux qui passaient par la rue Nationale, en plein cœur du quartier Belsunce, lundi 12 mars, aux alentours de 19h. Au programme ce jour-là, un débat sur un thème qui était déjà une promesse de campagne du candidat Mitterrand en 1981 : le droit de vote des étrangers.
Terra Nova, boîte à idées du PS
L’animateur du débat, Olivier Ferrand, est l’un des responsables de Terra Nova, un think tank lié au Parti Socialiste. Dès son arrivée, il annonce la couleur : il va essayer de faire le moins de politique possible. Pas facile pour ce fondateur de la boîte à idées, lui-même élu PS.
C’est donc à grands coups de diapo, tel un prof d’amphi consciencieux, qu’Olivier Ferrand avait choisi de s’attaquer au vaste et complexe sujet du droit de vote pour les étrangers.
Mise à part la forme très académique de sa présentation, quelques chiffres sautent aux yeux et ne manquent pas de retenir notre attention. On découvre ainsi, (ou redécouvre) que la France fait véritablement figure d’arriérée par rapport aux autres pays.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes ! Le pays serait trois fois en-dessous de la moyenne européenne en termes d’immigration. Pire encore, il apparaît comme étant au même niveau que le Japon, réputé pour être une des nations les moins accueillantes du monde… Le décor est planté.
Le penseur de Terra Nova va plus loin, qualifiant la France de pays d’émigration, provoquant ainsi quelques rires jaunes dans l’assemblée. Il pose la question "Le risque d’invasion serait-il un fantasme, une peur que le pays entretient ?".
Son éclairage, jalonné de chiffres tous plus effrayants les uns que les autres, met le doigt sur un élément majeur : le problème de l’immigration serait qualitatif avant d’être quantitatif.
Prenant l’exemple du Canada, terre d’accueil d’excellence, Olivier Ferrand s’étonne et puis s’insurge : "là-bas, on vient vous accueillir à l’aéroport, on vous offre des cours de langues !"
Nordine Hagoug, président de l’UFM 13 et voisin de table d’Olivier Ferrand, plaisante "Ici, on te raccompagne à l’aéroport !" Rires et regards entendus. Il faut dire que certains, pour ne pas dire beaucoup, présents ce soir-là, savent de quoi parle le conférencier devant eux.
Les quotas, les difficultés d’obtention des visas, ils s’y confrontent ou s’y sont confrontés un jour. Tout comme la problématique du droit de vote aux étrangers.
Mais après tout, qu’entend-on par étranger ?
Vaste débat
Et par immigré ? Voici entre autres les questions qui se sont posées ce soir-là dans les locaux de l’Union des Familles Musulmanes. Qui doit voter, pourquoi, pour quelles élections ? Ce soir-là au 26, rue Nationale, ce sont ces fils-là qu’Olivier Ferrand aura tenté de démêler.
"Et l’éligibilité des immigrés dans tout ça ?", s’exclame une dame d’une cinquantaine d’années. Ferrand regarde Patrick Menucci (entré discrètement en milieu de conférence), Menucci regarde Ferrand. "Oui, mais ce n’est pas possible pour toutes les élections, pour certaines, c’est compliqué… !"
"Compliqué, et pourquoi ?", grogne un pépé posé sur un tabouret en fond de salle.
Compliqué aussi de ne pas tout mélanger… Intégration, nationalité, puis droit de vote : les choses se passent-elles toujours dans cet ordre-là ? "Avant de parler d’intégration, on ferait mieux de parler d’acceptation !", réagit un chef d’entreprise venu assister au débat.
"Le PS, c’est du foutage de gueule, un enfumage complet !" renchérit un autre. Philosophe, Nordine Hagoug tient à préciser que M. Ferrand a accepté de venir débatte alors que d’autres ont purement et simplement refusé l’invitation.
L’ambiance s’échauffe même si beaucoup semblent favorables au droit de vote pour les nouveaux arrivants. Dans ce débat ô combien polémique, tous les mots ont leur importance et leur lot de significations.
Et tous n’étaient pas apolitiques ce soir-là, si l’on s'en tient aux propos anti-Sarkozy prononcés par un Menucci parfaitement dans son rôle, à quelque quarante jours du premier tour des élections présidentielles.
Crédit photo : JaHoVil
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Réactions des internautes
Lundi 19 Mars 2012, 11:11
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La constitution, le socle de notre droit, est claire : le droit de vote est lié à la nationalité.
"La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum.
Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice.
Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.
Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques." (Article 3 de la Constitition de 1958)
http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/constitution_11-2011.pdf
Le droit de vote des étrangers est anticonstitutionnel y compris celui des étrangers communautaires. Celui-ci a ouvert la voix aux revendications concernant celui des étrangers extra-communautaires et à présent à leur éligibilité.
Quant au fait que cette réunion s’est tenue au local de l’Union des Familles Musulmanes, c’est tout un symbole. Voici la réflexion de Malika Sorel : http://www.malikasorel.fr/archive/2012/03/06/francois-hollande-pieds-et-poings-lies.html
Si le PS perd ses élections, ce sera, en partie, comme en 2002, à cause de ses prises de positions sociétales.
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Mercredi 21 Mars 2012, 22:39
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Re:
Amélie, vous dites "Le droit de vote des étrangers est anticonstitutionnel y compris celui des étrangers communautaires. Celui-ci a ouvert la voix aux revendications concernant celui des étrangers extra-communautaires et à présent à leur éligibilité". Et je vous réponds en quoi serait-il gênant de penser à modifier cette Constitution empoussiérée ? L'excuse de l'anti-constitutionalité nous est servie à toutes les sauces : on dit cela pour refuser le mariage homo etc.Vous dites aussi "Quant au fait que cette réunion s’est tenue au local de l’Union des Familles Musulmanes, c’est tout un symbole. Voici la réflexion de Malika Sorel : http://www.malikasorel.fr/archive/2012/03/06/francois-hollande-pieds-et-poings-lies.html" justement, le symbole est là et c'est en toute logique que e débat s'est tenu là-bas à mes yeux. Bien sûr, il y a aussi d'autres débats sur le sjet et à d'autres endroits...preuve que la préoccupation concerne de nombreuses personnes, non ?
J'ai lu ce que dit Malika Sorel, c'est intéressant mais très engagé d'une certaine façon donc personnel (cf. le passage sur Ségolène Royal),
ps jmlesnuages = auteur de cet article :)
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Lundi 19 Mars 2012, 11:29
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Et d'aucuns s'étonnent encore des désillusions des classes moyennes et populaires, des forts taux d'abstention et du succès du FN...
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Mercredi 21 Mars 2012, 22:45
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Re:
"Et d'aucuns s'étonnent encore des désillusions des classes moyennes et populaires, des forts taux d'abstention et du succès du FN..."Quel rapport avec le débat sur le droit de vote pour les étrangers ? :)Répondre -