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"Vade Retro Spermato"

Jeudi 01/03/2012 | Posté par Emilie Delrieu (EJCM)

En février, le Planning Familial 13 organisait au Polygone Etoilé une projection-débat autour du documentaire "Vade Retro Spermato". Ce film de Philippe Lignières, qui était sur place, a pour thème la contraception masculine. Emilie assistait à la soirée.

Aujourd'hui il existe tout un ensemble de méthodes et de produits contraceptifs - hormonaux ou mécaniques, à la disposition de toute femme voulant maîtriser sa fertilité. Et les hommes dans tout ça ? A part le préservatif et la vasectomie - solution plus radicale qui conduit à l'infertilité, les hommes ont-ils accès à d'autres alternatives en matière de contraception ? La contraception masculine existe-t-elle réellement ? C'est à ces questions-là que le film de Philippe Lignières, présenté le mardi 7 février au Polygone Etoilé, tente de répondre.

Dans "Vade Retro Spermato", on  apprend que sous l'influence des mouvements féministes des années 70, des hommes ont commencé à réfléchir à cette question de la contraception masculine. C'est le cas, en 1979, avec la création de l'ARDECOM (Association pour la Recherche et le Développement de la Contraception Masculine), au sein de laquelle apparaissent les premiers groupes de paroles non-mixtes. Réunissant quelques centaines d'hommes, ces groupes s'interrogent sur la paternité, l'amour, la virilité ou encore la sexualité tout en partageant des techniques de contraceptions expérimentales.

Des hommes, d'âges et d'horizons divers, expliquent comment, à partir d'un protocole médical, ils ont accepté de suivre un traitement contraceptif hormonal, associant androgènes et progestérones, permettant de bloquer la production de spermatozoïdes. Un traitement cependant plutôt contraignant, avec des effets secondaires indésirables.

Un autre groupe d'hommes, lié à l'ARDECOM et issu de la région toulousaine, propose alors une alternative, en expérimentant la méthode dite d'hyperthermie intra scrotale, c’est-à-dire la contraception par la chaleur, appelée aussi, de façon plus vulgaire mais pour le moins explicite, "remonte-couilles toulousain".

Pour en résumer le principe : les testicules ne produisant plus de spermatozoïdes au-delà de 36°, il suffit, pour en arrêter la production, de les mettre à la température du corps en les logeant dans les canaux inguinaux, à l'aide d'un slip plutôt atypique, dont le film détaille les différents modèles, et qui ne manquent pas de faire rire le public.

Après la projection, un homme, d'une cinquante d'années, entame le débat : "La sensation que j'ai eue, c'est que la question de la contraception masculine était plus une excuse pour trouver un lieu de paroles d'hommes, entre hommes, qu'un combat pour la contraception en elle-même."

Le réalisateur répond que son film se base essentiellement sur les groupes de paroles d’hommes, et sur le fait, qu'à un moment donné, ces groupes ont débouché sur une interrogation, celle de la contraception, notamment à l'intérieur de l'association ARDECOM.

Philippe Lignières précise néanmoins qu'il s'agit d'une expérience ancienne, qui a un connu un essoufflement dans les années 80, notamment avec l'arrivée du SIDA et l'usage massif du préservatif, qui a alors changé la donne.

Philippe Lignières nous explique également l'ensemble des problèmes qui, selon lui, empêche le développement de la contraception masculine en France. "Si vous allez voir un toubib, il vous dit que la contraception masculine ça n'existe pas. Après ça n'intéresse pas les labos, parce que de toutes façons, la pilule est un jackpot extraordinaire, c'est une des molécules les plus rentables. Forcément ça concerne quand même pas mal de monde."

Il insiste également sur l'époque actuelle qui ne s'intéresse pas à ces interrogations liées à la masculinité, ainsi qu'à la difficulté de promouvoir la contraception masculine dans un pays qui ne s'est pas totalement affranchi de ses fondements patriarcaux.

Le débat s'anime peu à peu, une femme interpelle alors le réalisateur en lui demandant la marche à suivre pour un homme qui souhaiterait suivre un protocole de contraception masculine. Philippe Lignières lui répond qu'il suffit d'obtenir une ordonnance en se rendant dans les structures spécialisées à Toulouse, Paris ou Lyon, afin de rencontrer les andrologues qui s'occupent de cette question, "ce n'est pas toujours très pratique mais en termes de motivation c'est faisable."

Il précise aussi, qu'après le début d'un traitement hormonal, qui se fait à présent par injection intramusculaire hebdomadaire (bientôt mensuelle) de testostérone, il est nécessaire de faire des spermogrammes plusieurs fois dans l'année.

Concernant l'hyperthermie, il n'y a qu'un seul andrologue, basé au CHU de Purpan à Toulouse, qui travaille encore sur cette méthode. Il s'agit là aussi d'une prescription médicale de contraception, prise en charge par la sécurité sociale, prenant en compte les visites médicales et les spermogrammes.

Une femme prend ensuite la parole en prétendant défendre les acquis du mouvement féministe: "Est-ce que les femmes, qui ont mis des années à obtenir des moyens contraceptifs, et qui sont descendues dans la rue pour défendre leur liberté à disposer de leurs corps, accepteraient aujourd'hui de confier à nouveau ce pouvoir de décision d'avoir un enfant ou non aux hommes ?!"

"Moi ce qui m'intéresse c'est de maîtriser ma propre fertilité, répond calmement Ph. Lignières. C'est ce qu'on appelle la contraception et ça, ça concerne tout individu, aussi bien homme que femme. Il y a quand même un certain nombre d'hommes qui angoissent de ne pas maîtriser cette question-là et de peut-être s'exposer au risque de devenir père s'ils ne le souhaitent pas."

En clôture du débat, un jeune homme intervient pour souligner l’importance des groupes de paroles décrit dans le film : "il me semble que nous les mecs, pour parler de sexualité, au-delà des blagues de comptoir, voire des blagues sexistes, il nous faut un cadre hyper formalisé et surtout un cadre non mixte."

Pour ceux et celles qui souhaitent en savoir plus, ils peuvent s'adresser aux médecins du
Planning Familial à Marseille qui pourront leur donner les trois adresses (à Toulouse, Lyon et Paris), où sont expérimentées les différentes méthodes exposées dans le film, ou encore prendre contact avec les groupes de paroles d'hommes qui réapparaissent dans ces régions.

Cependant, le sujet de la contraception masculine est encore aujourd'hui très marginal en France, et dans le monde, puisqu'il n'est pas encore sorti du champ expérimental.



Crédit photo : Vade Retro Spermato



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Emilie Delrieu (EJCM) -